L’espace dans les arts
Dessinateurs et couturiers, concepteurs de jeux vidéo et plasticiens… l’espace n’a décidément pas de limite quand il s‘agit d’inspirer les artistes. Au CNES, nous avons notre Observatoire de l’Espace, véritable laboratoire culturel pour analyser, partager, stimuler ou produire des créations artistiques qui regardent du côté de l’espace.

Dessiner au lieu de voir
Si nos connaissances sur l’espace ont toujours été liées à nos capacités à voir de plus en plus loin, il y a souvent un fossé entre ce que l’on comprend et ce que l’on arrive réellement à observer. Représenter des lieux ou phénomènes lointains réclame donc un savant mélange d’imagination et de connaissances scientifiques. Comme tous les livres de Jules Verne, son récit lunaire en 2 tomes (De la Terre à la Lune en 1865 et Autour de la Lune en 1869) bénéficie de nombreuses et magnifiques illustrations, issues du travail de dessinateurs et de graveurs sur bois. Ainsi dans les dessins de Émile-Antoine Bayard et Alphonse de Neuville, on découvre la fusée, l’équipage en apesanteur et bien entendu le sol lunaire avec reliefs et cratères.
Par la suite, au cours du 20e siècle, de nombreux dessinateurs vont produire des représentations de la Lune, des planètes du système solaire, des étoiles dans un courant que certains appellent le Space art. Lucien Rudaux, par exemple, produit de magnifiques dessins, à la fois de sérieuses représentations de vulgarisation mais aussi des images qui relèvent plus de la science-fiction comme d’étonnants extraterrestres à 4 pattes vêtus d’un chapeau.

À partir des années 40, c’est un autre grand nom de ce mouvement qui se fait connaître : Chesley Bonestell. Il réalise de très nombreuses illustrations pour des magazines américains comme Life. Avec ses vues de planètes, ses fusées et astronautes, les œuvres de Chesley Bonestell invitent à la contemplation et au voyage. Son travail attirera l’attention des studios hollywoodiens où il travaillera pour les effets visuels de plusieurs films.
Haute couture spatiale
Symbole de modernité, la conquête spatiale a beaucoup et souvent inspiré le milieu de la mode. De nombreux couturiers se sont inspirés des tenues réelles des astronautes ou de tenues fantasmées des extraterrestres. C’est logiquement dans les années 60 que cette tendance est la plus forte, aboutissant même à un courant baptisé le Space age. André Courrèges en 1964 présente sa collection Moon girls dominée par la couleur blanche avec des robes rythmées par des formes géométriques et des lunettes à franges. Le couturier impose cette idée que le blanc sera la couleur du futur, prédiction souvent reprise dans la science-fiction dans les décennies suivantes. Autre grand nom du Space age, Pierre Cardin avait déjà marqué les esprits dès les années 50 avec une célèbre robe bulle avant de plonger complètement dans l’espace avec sa collection Cosmos en 1965. De nouvelles matières font leur apparition comme le vinyle ou le caoutchouc et la forme des chapeaux évoque des casques ou des scaphandres.

À la toute fin des années 60, quelques mois après l’alunissage d'Apollo 11, c’est un autre objet de mode d’inspiration spatiale qui voit le jour : la Moon Boot. On la doit à Giancarlo Zanatta qui s’inspire grandement des chaussures de Neil Armstrong et de leurs empreintes laissées dans la poussière lunaire pour dessiner des bottes de neige. Elles connaissent un énorme succès dans les années 80 et sont toujours commercialisées.
Si dans les années 60, les activités spatiales ont beaucoup influencé les formes des créateurs, aujourd’hui elles leur fournissent de nouveaux textiles. En 2020, la maison Balenciaga a présenté une collection en collaboration avec la NASA dont l'une des pièces remarquées est un manteau reprenant la forme, la couleur et les écussons des combinaisons des astronautes. Bien entendu, le logo de l’agence spatiale américaine figure sur toutes les tenues de cette collection, comme il figure d’ailleurs sur des millions de tee-shirts, sweats, blousons, chaussettes et sacs à dos partout dans le monde.

Exposer dans l’espace
Dès que l’humain arrive sur nouveau territoire dans l’espace, des projets artistiques y voient le jour. Sur la Lune, sur Mars, dans les stations spatiales, partout d’incroyables et improbables œuvres ont été créées ou exposées. En 1969, alors que les astronautes préparent leur voyage à destination de la Lune, Forrest Myers ambitionne de créer le premier musée sur la Lune. Son projet Moon museum prend la forme d’une petite plaque sur laquelle figurent des dessins de plusieurs artistes dont Andy Warhol. Faute d’accord avec la NASA, ce mini musée n'est pas embarqué à bord d'Apollo 11 mais depuis des rumeurs circulent sur son dépôt clandestin sur le sol lunaire. Officiellement, c’est en 1971 qu’est importée sur la Lune la première œuvre humaine. Il s’agit d’une petite sculpture en aluminium de 8 cm signée Paul Van Hoeydonck. Baptisée Fallen astronaute (L’astronaute tombé), cette œuvre rend hommage aux astronautes morts pour la conquête spatiale.

En 2000, c’est sur Mars qu’est envoyée une œuvre d’art. À bord de l'atterrisseur Beagle 2, se trouve en effet une palette colorée de Damien Hirst. Beagle 2 a malheureusement eu un problème lors de son amarsissage et n’a jamais depuis donné signé de vie, mais l'œuvre est bien arrivée à destination. Autre grande première, en 1995, la première exposition hors de la Terre est organisée à bord de la station MIR. Elle est composée de 20 œuvres de 21 x 30 cm signées par 20 artistes différents. Depuis de nombreux projets ont vu le jour à bord de la Station Spatiale Internationale. En 2015, par exemple, une petite mosaïque colorée flotte à bord de la station. C’est une réalisation du street artiste Invader, connu pour ses œuvres urbaines, notamment ces Space Invaders en pixel (des carreaux de faïence en général) que l’on retrouve dans de très nombreuses villes partout sur Terre.
Nous inventons en permanence avec les artistes de nouveaux protocoles de création afin d’éviter que la production artistique dans l’espace ne se calque sur les procédures habituelles de la Terre. Il est indispensable de proposer des chemins de traverse aux artistes qui cherchent à travailler de manière respectueuse avec l’espace.
- Responsable de l’Observatoire de l’Espace au CNES

Un observatoire unique en son genre
Grâce aux travaux des acteurs du spatial, les artistes ont accès à de nouveaux imaginaires, de nouvelles images, de nouvelles questions. Grâce aux artistes, la recherche spatiale s’enrichit de nouveaux récits, diffuse ses résultats et sa démarche dans la société. C’est pour stimuler le travail entre ces 2 mondes que l’Observatoire de l’Espace a été créé chez nous, au CNES. Structure unique, l’Observatoire de l’espace organise des résidences d'artistes en donnant accès aux laboratoires, installations et archives du CNES. Ainsi chaque année, plusieurs projets ou expositions voient le jour. Souvent dans des musées bien terrestres mais parfois aussi dans l’espace. En 2017, par exemple, l'artiste Eduardo Kac a pu réaliser l’œuvre Télescope intérieur à bord de la station spatiale européenne. L'artiste a imaginé un pliage de papier effectué par Thomas Pesquet à bord de la station avant de flotter en apesanteur dans l’habitacle. Un film a été produit pour retracer toutes les étapes de ce projet artistique.

Lors de résidences organisées sur Terre, des artistes comme Sylvie Bonnot ou Justine Emard, ont travaillé avec des archives photographiques ou audiovisuelles pour réaliser leurs pièces ; la première sur le centre spatial guyanais avec Géographie d’une fusée et la deuxième sur les non-humains dans l’Espace avec le film In praesentia.
Au-delà de ces créations, l’Observatoire de l’Espace édite des publications et organise des événements pour réfléchir aux récits que la recherche spatiale inspire et analyser comment les artistes s'approprient cette matière inépuisable.
Quizz
Dans le jeu Space Invaders, quel est l’objectif principal du joueur ?
A – Sauver des otages capturés par les aliens
B – Protéger les villes en détruisant les vaisseaux ennemis
C – Défendre la Terre contre une invasion extraterrestre
D – Explorer des galaxies à la recherche de ressources
C : Dans Space Invaders, le joueur contrôle un canon laser et doit détruire des vagues de vaisseaux extraterrestres qui descendent lentement vers la Terre. Le jeu est considéré comme l’un des premiers grands succès de l’histoire du jeu vidéo, ayant marqué les années 1970.