Publié le 27 janvier 2025

Vendée Globe : Cospas-Sarsat veille sur les skippers jour et nuit

  • Actualité

  • Télécommunications

  • Données spatiales

Le programme mondial de localisation par satellite dont le CNES est l’un des principaux organisateurs assure une surveillance permanente qui permet d’activer les secours en quelques minutes si besoin.

Le Centre de contrôle de mission Cospas-Sarsat (FMCC) au centre spatial de Toulouse.
Le Centre de contrôle de mission Cospas-Sarsat (FMCC) au centre spatial de Toulouse. © CNES/DE PRADA Thierry, 2021

Cette année encore, le Vendée Globe réserve son lot d’exploits et d’émotions fortes, à commencer par le dénouement exceptionnel offert par le vainqueur Charlie Dalin et son dauphin Yohann Richomme. En moins de 65 jours pour le premier, à peine plus pour le deuxième, les deux skippers ont pulvérisé les records établis lors des éditions précédentes. Mais, alors qu’ils sont revenus à terre depuis les 14 et 15 janvier, la course se poursuit. L’essentiel de la flottille ferraille encore avec les éléments dans l’océan Atlantique pour boucler ce tour du monde sans escale et sans assistance.

Vue depuis le bateau Groupe APICIL lors de la course à la voile du Vendée Globe le 20 janvier 2025.
Vue depuis le bateau Groupe APICIL lors de la course à la voile du Vendée Globe le 20 janvier 2025. © Damien Seguin, #VG2024, 2025

En 2020, un sauvetage épique

Au long de ce périple hors normes, la sécurité des navigateurs est la principale préoccupation de la direction de course. Elle repose en grande partie sur les systèmes satellitaires, et en particulier sur le programme international de localisation Cospas-Sarsat. Celui-ci veille sur eux jour et nuit. En cas d’alerte, où qu’elle se produise, il permet de lancer une intervention des secours maritimes en quelques minutes. 

Heureusement, aucune n’a encore été déclenchée lors de cette édition. Mais tous les amateurs gardent en mémoire le sauvetage épique de Kévin Escoffier par Jean Le Cam, en 2020, au large du cap de Bonne Espérance. À l’époque, 3 minutes seulement s’étaient écoulées entre le déclenchement de la balise de détresse depuis l’embarcation de sauvetage d’Escoffier et la mise en route des secours, alors que le bateau sombrait à grande vitesse. Il avait fallu encore 11 heures au « roi Jean », qui s’était dérouté, pour récupérer le naufragé sain et sauf à son bord en s’appuyant sur les données Cospas-Sarsat de localisation fine de la balise.

YouTube Lien vers la page YouTube

Une coopération mondiale

Cette efficacité est rendue possible par le maillage mondial et l’organisation de Cospas-Sarsat. Le programme résulte d’une coopération internationale de plus de 40 ans. Celle-ci a été initiée par quatre pays, le Canada, les Etats-Unis la Russie et la France, auxquels se sont joints 45 États et organisations participantes. 

Pour fonctionner, le système utilise trois composantes : 

  • des balises, qui émettent un signal de détresse lorsqu’elles sont déclenchées ;
  • les satellites équipés de charge utile Cospas-Sarsat, qui captent le signal. Il y en a une soixantaine au total. Historiquement, il s’agissait de satellites en orbite basse et géostationnaires, le programme sollicite désormais principalement des constellations en orbite moyenne, du type Galileo et GPS ;
  • les centres de contrôle mission (MCC), 31 répartis dans le monde, vers lesquels le signal est redirigé, qui guident les secours vers les balises. 6 centres dits « nodaux », dont le FMCC implanté au CNES de Toulouse, coordonnent leur action opérationnelle.

Depuis sa création, le programme Cospas-Sarsat a permis de sauver plus de 60000 vies, dont 2800 pour la seule année 2023.

Laure Luno

  • Cheffe de projet Cospas-Sarsat au CNES
Portrait de Laure Luno.

Les balises au cœur du système

« Pour détecter une situation de détresse, il faut impérativement qu’il y ait eu l’émission d’un signal par l’une des 3 millions de balises déployées dans le monde », précise Laure Luno, chef de projet Cospas-Sarsat au CNES.  

C’est la raison pour laquelle le système ne permet pas systématiquement d’éviter les drames qui se déroulent en mer. 

Mais aujourd’hui, toute embarcation commerciale ou de tourisme s’éloignant de plus de 2 milles des côtes doit en être équipée, de même que les avions. Il existe également des balises individuelles pour les personnes qui se déplacent dans des zones sans couverture téléphonique. 

« Sur ce Vendée Globe, nous avions 148 balises. Chaque bateau dispose au minimum d’une balise maritime se déclenchant automatiquement au contact de l’eau, et les skippers portent sur eux une balise personnelle avec un mode d’émission manuel », détaille Laure Luno. 

Ces balises sont toutes répertoriées dans le registre des balises de détresse géré par le centre de contrôle mission français (FMCC), implanté au Centre spatial de Toulouse, où se trouvent également 4 stations sol de réception (LUT) correspondant aux différents types de satellites utilisés par le programme. 

Antenne de réception Cospas-Sarsat au centre spatial de Toulouse.
Antenne de réception Cospas-Sarsat au centre spatial de Toulouse. © CNES/DE PRADA Thierry, 2021

Activation immédiate des secours

« En cas d’émission d’une alerte, nos opérateurs en veille 24 h sur 24 savent immédiatement qu’un skipper du Vendée Globe est en difficulté et activent les secours sur la zone de détresse concernée. S’il s’agit de la zone de responsabilité française, couvrant l’Europe, et une partie de l’océan Atlantique et de l’océan Indien, c’est un CROSS français qui opère le sauvetage selon nos indications, dans tous les autres cas, nous nous coordonnons avec le MCC de la zone concernée », explique l’experte. 

Une fois le signal émis, la balise émet pendant plusieurs jours. Le MCC suit la position dérivée tant que le sauvetage n’a pas eu lieu et la transmet régulièrement à l’équipe de secours. C’est ce qui s’était produit en 2020 pour guider Jean Le Cam vers la position de Kévin Escoffier. 

Argos ou Cospas-Sarsat, quelle différence ?

Le programme Cospas-Sarsat utilise le même type de technologie satellitaire que le système Argos, créé en 1978 par le CNES et l’Agence américaine d’étude de l’atmosphère et de l’océan (NOAA). Aujourd’hui opéré par Kinéis, filiale du CNES et de CLS, Argos est le système de localisation et de collecte de données de référence pour le suivi environnemental, mais aussi la gestion du transport maritime. La différence tient au fait que les 14000 balises Argos déployées partout dans le monde émettent en permanence, là où les balises de détresse Cospas-Sarsat ne se déclenchent qu’en cas d’alerte, de manière automatique ou par une activation volontaire. Une nouvelle génération de moyens Argos est en cours de déploiement autour d’une constellation de 25 nanosatellites, dont les 15 premiers ont été lancés en 2024. 

Sur le site du FMCC, à Toulouse, 12 ingénieurs du CNES interviennent dans les activités du programme Cospar-Sarsat, en binôme avec 11 agents des directions des affaires maritimes et de l’aviation civile qui assurent le suivi opérationnel du FMCC. Ces équipes travaillent en lien étroit avec le service européen SAR Galileo. 

Un des défis auxquels ce système fait face est le grand nombre de fausses alertes en raison de mauvaises manipulations ou de mauvais cas d’usage, d’où l’importance de bien collecter et traiter les signaux reçus. 

« Sur 3 millions de balises, il n’est pas toujours simple de faire la part des choses, mais nous suivons toute une procédure pour éviter de mobiliser des secours quand ce n’est pas nécessaire. Quoi qu’il en soit, il faut réagir en quelques minutes pour sauver des vies », conclut Laure Luno.

Continuez votre exploration