SVOM en détails

Contexte

Les sursauts gamma sont de brusques et intenses bouffées de lumière X et gamma. Ils sont associés à la formation cataclysmique des trous noirs, soit par fusion de deux astres compacts (étoiles à neutrons et/ou trous noirs), soit par l'explosion soudaine d'une étoile massive (supernovae), vingt à cent fois plus grosse que notre propre Soleil. La naissance d’un trou noir s'accompagne de la formation de jets de matière, dans lesquels les vitesses atteintes sont proches de la vitesse de la lumière (300 000 kilomètres par seconde). Ces jets de matière décélèrent ensuite dans le milieu circumstellaire, balayant tout sur leur passage. Les sursauts gamma, si brillants, sont observables aux confins de l'Univers, agissant comme de véritables phares éclairant l'âge sombre de sa création.

Bien que très étudiés ces quinze dernières années, les sursauts gamma sont des phénomènes encore mal compris.

Vue d’artiste d’une étoile émettant un sursaut gamma
Vue d’artiste d’une étoile émettant un sursaut gamma © NASA / SkyWorks Digital

Objectifs

  • Détecter et étudier les sursauts gamma de l’Univers

  • Étudier la première génération d’étoiles (population III)

  • Apporter de nouvelles contraintes sur une possible violation de l’invariance de Lorentz

  • Explorer différentes populations de sursauts gamma (i.e. sursauts "sombres" et X-ray flashes)

La mission SVOM a pour objectif principal la détection et l'étude des sursauts gamma. Ces explosions stellaires puissantes sont attribuées aussi bien à l'explosion d'étoiles massives (plus de 20 fois la masse du soleil) qu’à la coalescence (c’est-à-dire la fusion) de systèmes binaires comportant soit une étoile à neutrons soit un trou noir. Ces événements extrêmes conduisent à la naissance d'un trou noir, qui grossit rapidement en avalant en quelques secondes la matière dans son entourage immédiat. Cette accrétion s'accompagne de l'éjection de jets relativistes qui, lorsqu'ils sont dirigés vers la Terre, conduisent à l'observation d'un sursaut gamma. 

Les chocs violents qui se produisent au sein des jets produisent des flots de rayons X et gamma, tandis que le choc des jets sur le milieu environnant déclenche une émission rémanente ('afterglow') en rayons X, visible, et ondes radio. Pendant quelques secondes, la luminosité d'un sursaut gamma dans le domaine visible peut atteindre un million de fois celle des supernovae les plus brillantes.

En garantissant l'observation multi longueurs d'onde d'environ 80 sursauts gamma de tous types par an, la mission sino-française SVOM apportera une contribution unique aux deux axes de recherche les plus féconds ayant émergé des avancées récentes : l'utilisation des sursauts en cosmologie et la compréhension du phénomène.

L'observation dans le domaine des rayons X et gamma est naturellement indispensable puisqu'elle est la seule méthode permettant de détecter les sursauts gamma. Elle ne permet toutefois l'observation que d'une partie du phénomène, l'émission prompte, qui est la seule source d'émission dans ce domaine spectral.

Afin d'accéder aux autres informations indispensables à la compréhension des sursauts, il est nécessaire d'étendre l’observation spectrale aux domaines optique et proche infrarouge. Les sursauts offrent en effet la particularité d'émettre aussi dans ces bandes spectrales tout au long de leur courte vie, ce qui permet d'accéder à des informations indispensables et inaccessibles par ailleurs, comme par exemple la distance ou l'environnement du sursaut.

Les objectifs scientifiques de la mission SVOM peuvent ainsi être résumés :
 

Objectifs pour la cosmologie

  • Tracer directement la formation d'étoiles au sein des galaxies les plus lointaines dans la mesure où les sursauts gamma marquent la fin de l'évolution d'étoiles massives.
  • Étudier la première génération d'étoiles (étoiles de population III) supposée avoir formé des étoiles particulièrement massives, potentiellement aptes à générer des sursauts gamma au terme de leur rapide évolution.
  • Permettre l'étude de tous les milieux en avant plan, y compris ceux de la galaxie hôte, afin de tracer l'histoire de la ré-ionisation de l'univers et de son enrichissement en métaux.
     

Objectifs pour la physique fondamentale

  • Tester certains aspects de physique fondamentale en apportant de nouvelles contraintes sur une possible violation de l'invariance de Lorentz.
     

Objectifs pour l'astrophysique des hautes énergies

  • Explorer différentes populations de sursauts gamma (comme par exemple les sursauts "sombres" et les X-ray flashes).
  • Dévoiler la nature des sursauts courts.
  • Étudier la nature de l'émission prompte.
  • Étudier les relations entre l'émission prompte et l'émission rémanente
  • Étudier les relations entre sursauts gamma et explosions de supernova.
  • Explorer le moteur central des sursauts gamma, en particulier par le truchement d'un éventuel précurseur.
  • Étudier la physique des éjections relativistes qui sont aussi à l'œuvre dans de nombreux sites astrophysiques tels que les noyaux actifs de galaxie ou les microquasars.
  • Déterminer la nature des étoiles à l'origine des sursauts gamma, condition pour une utilisation judicieuse des sursauts gamma en cosmologie.
     

Des moyens spatiaux et des moyens sols au service de la mission

Pour atteindre les objectifs scientifiques de la mission SVOM, la stratégie de mesure envisagée combine au mieux les moyens d'observations spatiaux et les moyens sol associés.
 

Tâches dévolues aux moyens embarqués :

  • Détecter et localiser les sursauts gamma, et transmettre rapidement cette information au sol, ce qui implique une instrumentation à grand champ opérant dans la bande des rayons X durs et des rayons gamma de basse énergie,
  • Observer l'émission prompte des sursauts dans la bande des hautes énergies, ce qui implique une instrumentation à grand champ couvrant la gamme spectrale la plus large des rayons X mous (~1 keV) aux rayons gamma de basse énergie (quelques MeV),
  • Observer l'émission rémanente précoce dans le visible et le proche infrarouge, ce qui implique une instrumentation à petit champ.
     

Tâches dévolues aux moyens sol :

  • Mesurer avec précision les coordonnées célestes du sursaut,
  • Mesurer l'évolution photométrique de l'émission rémanente dans plusieurs bandes spectrales (du visible au proche infrarouge),
  • Et fournir une estimation photométrique de son décalage vers le rouge.
  • Durée de la mission : minimum 3 ans, extension possible de 2 ans

Altitude d'orbite : proche de 600 km, inclinée à 30 °

 

Déroulé du projet

Le satellite SVOM a été lancé en juin 2024 et a été placé sur une orbite de 625 km d'altitude, peu inclinée pour éviter les perturbations existant dans les zones polaires. Quand un sursaut gamma est détecté par l'instrument ECLAIRs, le satellite a la capacité de se réorienter très rapidement (en quelques minutes) pour compléter les premières observations avec celles dans le domaine des rayons X mous avec l'instrument MXT et dans le domaine visible avec l'instrument VT. L'information est également transmise au sol en moins d'une minute pour que le sursaut soit observé par des télescopes robotiques dédiés et les grands télescopes au sol.

À ce jour, des dizaines de sursauts de différents types ont d’ores et déjà été observés et caractérisés.

 

Organisation

Un MoU a été signé en novembre 2006 au niveau des directions d'agences spatiales (CNES/CNSA) à l'occasion de la visite du Président de la République Française en Chine. Suite à un nouveau partage des responsabilités, ce MoU a été amendé et signé début août 2014 lors de la visite du Président du CNES à Pékin. Ce dernier document sert de référence à la mise en place des activités CNES sur le projet SVOM. Le projet SVOM est donc une coopération entre l'agence spatiale chinoise (CNSA), l'Académie des Sciences chinoise (CAS) et le CNES. Le partage des responsabilités se fait comme suit :

  • La mission, le lancement, le satellite et les opérations sont sous responsabilité chinoise alors que les instruments et les composantes sol sont partagés entre la Chine et la France.
  • Les études de définition système, satellite et charge utile font l'objet d'une coopération technique entre le CNES et les équipes chinoises du SECM (Shanghai Engineering Center for Microsatellites), chacun intervenant pour ce qui concerne les éléments de sa propre responsabilité.
  • Plus précisément, le CNES assure la maîtrise d'œuvre des développements de la charge utile française (ECLAIRs, MXT) et la maîtrise d'ouvrage du système d'alerte (réseau VHF sol) et des éléments français de la composante sol (centre de suivi de la charge utile, centres d'expertise scientifique).

 

Les principaux intervenants chinois

  • La "China National Space Administration" (CNSA), responsable programmatique de la mission
  • La "Chinese Academy of Science" (CAS), responsable technique du projet par délégation de la CNSA, au travers des organismes suivants :
    • Le Shanghai Engineering Centre for Microsatellites (SECM), responsable du satellite et du module Charge-Utile ; cet institut est le principal interlocuteur technique du CNES
    • Des laboratoires impliqués dans le programme scientifique et le développement des instruments :
      • Le National Astronomical Observatory of China (NAOC) pour la responsabilité scientifique de la mission et pour le développement des instruments sol GFT (Ground Follow-up Telescope) et GWAC (Ground Wide Angle Camera)
      • l'Institute of High Energy Physics (IHEP) pour l'instrument GRM (Gamma Ray Monitor)
      • Et le Xi'an Institute of Optics and Precision Mechanics (XIOPM) pour l'instrument VT (Visible Telescope)
  • Les laboratoires impliqués dans le développement du segment sol :
    • Le « National Astronomical Observatory of China » (NAOC) pour la responsabilité du Chinese Ground Observation System (CGOS incluant les instruments C-GFT et GWAC) et du Chinese Science Center
      • Le « National Space Science Center » (NSSC) pour la responsabilité du centre de mission, du centre de données
      • “l’Institute of Remote Sensing and Digital Earth” (RADI) pour la station bande X
  • Le «China Satellite Launch and Tracking Control» (CLTC), responsable du segment sol de contrôle satellite (centre de contrôle, stations bande S) et des opérations en vol associées 
  • Le «China Academy of Launch Vehicle Techology (CASC-CALT), responsable du lancement (lanceur LM2C et site de lancement Xichang XSLC)

 

Les principaux laboratoires scientifiques français

  • Le CEA/IRFU (Institut de Recherche sur les lois Fondamentales de l'Univers) pour la responsabilité scientifique de la mission, pour la responsabilité scientifique de l’instrument MXT et pour sa contribution au développement des instruments ECLAIRs et MXT et la maîtrise d'œuvre du développement du centre d'expertise scientifique dédié à la gestion de l'alerte, à l'élaboration, la diffusion et l'archivage des produits scientifiques, et au suivi de l'instrument MXT.
  • L’IRAP (Institut de Recherche en Astrophysique et Planétologie) pour la responsabilité scientifique de l’instrument ECLAIRs et pour sa contribution au développement du DPIX (plan de détection de l'instrument ECLAIRs), pour la maîtrise d'œuvre du développement de la caméra infrarouge CAGIRE et pour sa participation au développement du centre d'expertise scientifique de l'instrument ECLAIRs.
  • Le LAM (Laboratoire d'Astrophysique de Marseille) pour la co-responsabilité scientifique de la mission et pour sa participation au programme d'observation par des télescopes sol (Follow-up), au développement des outils d'analyse et à l'élaboration des produits scientifiques.
  • L’APC (laboratoire AstroParticules et Cosmologie) pour la responsabilité scientifique du Programme Général de la mission (science hors sursauts) et pour sa participation au développement de l'instrument ECLAIRs.
  • L’IAP (Institut d'Astrophysique de Paris) pour sa participation au développement des centres d'expertise scientifique et plus particulièrement à l'élaboration des produits scientifiques.

Le CPPM (Centre de Physique des Particules de Marseille), l’Observatoire de Strasbourg, le LUPM (Laboratoire Univers et Particules de Montpellier), le GEPI (laboratoire Galaxies, Etoiles, Physique et Instrumentation) et l’IJCLab (Laboratoire de physique des deux infinis Irène Joliot-Curie) contribuent également à la préparation de la mission.

Les représentants de ces laboratoires sont également réunis au sein d'un Comité Scientifique SVOM en charge d'élaborer le programme scientifique de la mission conjointement avec leurs homologues chinois.