Publié le 05 septembre 2024

Un million de tirs pour ChemCam sur Mars

  • Système solaire

Lundi 19 août 2024, le millionième tir laser sur Mars de ChemCam, l’un des instruments du rover Curiosity de la NASA, a été planifié par les équipes françaises depuis le CNES.
Image prise par ChemCam, à bord du rover Curiosity de la NASA, de l'environnement martien le jour du millionième tir laser (le 21/08/2024 / Sol 4281)
L'environnement martien de Curiosity vu par ChemCam (RMI) le jour de son millionième tir laser. © NASA/JPL-Caltech/LANL

Deux jours plus tard, mercredi 21 août vers 20h20 heure française, le millionième tir de ChemCam a été exécuté. C’était le Sol 4281, soit le 4281e jour martien de la mission. Les données ont été reçues le lendemain pour être analysées par l’équipe américaine.

 

Royce Lakes, la cible du millionième tir

La cible de ce millionième tir : un fragment de roche, nommé Royce Lakes, qui a été cassé par le rover lui-même lorsqu’il a roulé dessus.
L’intérieur blanchâtre de la roche, qui contrastait avec l’aspect rouge-orangé de la surface martienne, a immédiatement attiré l’œil des scientifiques.

Montage de deux images ChemCam avec la localisation des tirs laser (points numérotés de 1 à 5, il y a 30 tirs sur chaque point. © NASA / JPL-Caltech / CNES / LANL / IRAP / LPGN / IAS / CNRS / MSSS

Du soufre à la surface de Mars

D’autres observations récentes ont été déterminantes dans le choix de cette cible : des cristaux de soufre ont été découverts dans une vallée du mont Sharp, que le rover gravit actuellement. Les scientifiques se demandent si cette roche présentera les mêmes propriétés…

Comme d’habitude, plusieurs points de mesure ont été fait sur cette cible, 5 au total. Et sur chaque point, plusieurs tirs : 30 en tout. Chaque tir aboutit à l'obtention d'un spectre qui donne des informations et enrichit la base de données des compositions martiennes.
Ce millionième tir représentait le 11ème tir sur le 4ème point.

Cible du millionième tir laser de ChemCam sur Mars
Zoom sur le millionième tir de ChemCam visant le 4ème point. © NASA / JPL-Caltech / CNES / LANL / IRAP / LPGN / IAS / CNRS

Les 30 spectres obtenus avec les tirs laser sur le 4ème point de la cible Royces Lakes. Le 11ème tir représente le millionième effectué sur Mars par ChemCam avec autant de données renvoyées sur Terre pour analyse. © NASA / JPL-Caltech / CNES / LANL / IRAP / CNRS

© NASA / JPL-Caltech / CNES / LANL / IRAP / CNRS

A propos des lasers ChemCam et SuperCam

Les lasers de ChemCam et de SuperCam envoient un faisceau infrarouge pour vaporiser à quelques mètres un tout petit peu de matière rocheuse sous la forme d’un plasma chaud dont la lumière est décomposée pour en déterminer la composition chimique. 
Cette méthode est appelée spectrométrie induite par laser (Laser induced Breakdown Spectroscopy, ou LIBS). 

Le laser de SuperCam peut également émettre un deuxième faisceau laser de couleur verte qui contribue à déterminer la présence de minéraux et faire fluorescer d’éventuels composés organiques. 
Cette technique d’analyse s’appelle la spectroscopie Raman. 

Ainsi ces deux techniques ont été expérimentées pour la première fois sur Mars avec ChemCam pour la LIBS et SuperCam pour le Raman afin de permettre aux scientifiques de mieux déterminer les composants en présence.

Notre plus grande force de frappe réside dans la collaboration internationale, technique et scientifique autour de ce projet. L'apport de cette nouvelle méthode d'analyse sur Mars a ouvert un nouveau domaine d'étude qui consiste à étudier les roches à l'échelle du grain.

Olivier Gasnault, Chargé de Recherche au CNRS et à l'IRAP et co-responsable de ChemCam

Vue d’artiste de l’utilisation de la ChemCam
© NASA/JPL-Caltech.

ChemCam, l’instrument franco-américain à bord du rover Curiosity de la NASA

La mission de ChemCam est de mesurer la composition chimique et de prendre des images des roches et du sol à la surface de Mars.

La partie française de ChemCam est le fruit d'un partenariat entre le CNES, le CNRS-INSU, plusieurs universités (Toulouse, Bordeaux, Paris, Lorraine, Lyon) et le CEA. 
ChemCam est placé sous la responsabilité scientifique conjointe du Los Alamos National Laboratory (LANL) au Nouveau-Mexique (Etats-Unis) et de l'Institut de Recherche en Astrophysique et Planétologie (IRAP) de l'Observatoire Midi-Pyrénées à Toulouse. 
Le CNES joue un rôle majeur dans son exploitation opérationnelle et technique, conjointement avec le Jet Propulsion Laboratory (JPL) et les laboratoires de recherche des deux côtés de l'Atlantique.

Avec les missions MSL/Curiosity et Mars 2020/Perseverance, nous sommes devenus des partenaires de confiance de la NASA. Nos instruments et nos équipes ont fait leurs preuves.

Valérie Mousset, cheffe de projet MSL/Curiosity au CNES

En arrivant sur Mars, le laser de ChemCam était le plus puissant à opérer à la surface d’une planète extraterrestre, jusqu’à l’arrivée du laser SuperCam en février 2021 embarqué sur le rover Perseverance de la NASA.
Ces deux lasers ont été réalisés par les équipes laser de Thales en France, sous maîtrise d’ouvrage du CNES et suite à une R&T au CNES au début des années 2000.

Conçu pour fonctionner deux années, le laser ChemCam opère depuis 12 ans. Cette longévité est une véritable fierté pour les équipes du groupe et ce millionième tir est une étape symbolique majeure pour cette aventure technologique hors-normes. Une aventure qui se poursuit avec le CNES et la NASA avec un deuxième laser, celui de l’instrument SuperCam du rover Perseverance, sur Mars depuis 2021.

Eric Durand, Responsable des programmes lasers ChemCam et SuperCam au sein des activités optroniques de Thales

Curiosity au cœur de la mission MSL de la NASA

La mission MSL (Mars Science Laboratory) est pilotée par le JPL (Jet Propulsion Laboratory), aux Etats-Unis. Curiosity y a été conçu, développé et assemblé. La mission nominale était d’une année martienne (un peu plus de deux ans sur Terre). Cela fait aujourd’hui 12 ans que le rover sillonne la planète rouge ! Il a parcouru plus de 32 km au sein du cratère Gale et ses instruments ont collecté de nombreuses données de composition minéralogique et chimique, étudié la géologie du site et surveillé la météorologie et les radiations sur Mars.

Cette mission a permis de découvrir des rivières et des lacs asséchés, de mettre en évidence une ancienne activité hydrologique sur Mars avec des cycles d’hydratation et d’assèchement de la surface. Cette mission a découvert un environnement ayant pu être favorable à une forme de vie simple si elle avait existé.

Avec ce millionième tir, ChemCam n’a pas fini de nous livrer les secrets de la planète rouge !

Continuez votre exploration