Publié le 26 juin 2024

Comment ne plus confondre ergol et propergol

  • Transport spatial

Pour faire décoller un lanceur, il faut faire interagir un carburant et un comburant, les ergols. Ceux-ci peuvent être liquides ou solides, placés dans des réservoirs différents ou mélangés.
Un ergolier fait le plein avant le décollage
© CNES/ESA/Arianespace/Optique Vidéo CSG/P Piron, 2024

Publié le 22 mars 2022

Ergol, propergol… ces termes propres au secteur spatial se ressemblent, mais ne désignent pas tout à fait la même chose. Pour bien saisir la différence, il faut comprendre d’où vient l’énergie permettant à une fusée de s’élever et de gagner l’espace. Celle-ci est produite par la combustion d’un carburant, ou réducteur, et d’un comburant, ou oxydant. Ce sont ces substances que l’on appelle des ergols. Il existe plusieurs types de carburants liquides, mais sur les lanceurs Ariane c’est de l’hydrogène à la température de -250°C qui est utilisé – il était déjà présent sur le 3e étage d’Ariane 1 lors de son lancement en 1979. Quant au comburant nécessaire à la combustion, il s’agit le plus souvent d’oxygène liquide. Sur Ariane 6, ces ergols liquides, injectés dans des réservoirs distincts juste avant le tir, alimentent le moteur Vulcain 2.1 de l’étage principal (156 tonnes d’ergols) et le moteur Vinci de l’étage supérieur (33 tonnes).

« Au sol, l’oxygène de l’air suffit pour provoquer la combustion, mais très rapidement, quand le lanceur atteint l’espace au bout de 80 à 100 secondes, ce n’est plus le cas. C’est pour cela qu’il doit emporter dans ses réservoirs les deux types d’ergols liquides, carburant et comburant. »

Christophe Bonhomme

  • Sous-directeur de la sous-direction Systèmes de transport spatial au CNES
Portrait de Christophe Bonhomme
Destockage du module ULPM d'Ariane 6 au BAL
Destockage du module ULPM d'Ariane 6 au BAL © CNES/ESA/Arianespace/Optique Vidéo CSG/P Baudon, 2022

Substance composite

Sur Ariane, au décollage, ce sont les boosters situés en bas du lanceur qui assurent la plus grande partie de la poussée initiale. Au nombre de 2 ou 4 sur Ariane 6, ils sont remplis de propergol solide, une substance composite dans laquelle le mélange carburant-comburant est déjà fait.

« Pour le fabriquer, on mélange un liant, polymère appelé polybutadiène hydroxytéléchélique (PBHT) sous forme d’un liquide visqueux, avec une charge oxydante sous forme de poudre, le perchlorate d’ammonium, et une charge réductrice, de la poudre d’aluminium. Après malaxage, l’ensemble est coulé dans le moteur, puis cuit dans un four où il prend l’aspect d’un matériau dur et caoutchouteux. Ce mélange reste inerte tant qu’il n’est pas chauffé. Lors du décollage, on le chauffe avec une flamme créée par l’allumeur pour provoquer la combustion », explique Christophe Bonhomme. Le propergol solide est fabriqué en Guyane chez Regulus, une entreprise détenue par Avio et ArianeGroup. Chaque booster d’Ariane 6 en contient 142 tonnes.

Le saviez-vous

Sur les futurs lanceurs, un nouvel ergol pourrait être utilisé comme carburant en remplacement de l’hydrogène liquide. Il s’agit du méthane liquide, qui présente l’intérêt d’être liquide à une température proche de celle de l’oxygène (-160°C) et d’avoir une masse volumique plus importante (440 kg/m3, à comparer à 70 kg/m3 pour l’hydrogène liquide). Ces caractéristiques le rendraient moins cher et plus simple à utiliser. Cela a conduit à privilégier la combinaison d’ergols méthane-oxygène dans la réflexion sur les futurs lanceurs réutilisables. Une démonstration dans cette configuration aura lieu cette année à Vernon, avec un premier essai au sol du prototype de lanceur réutilisable Themis équipé du moteur Prometheus, préfigurant les moteurs de nouvelle génération.