Instruments

L’atterrisseur SERIES-2

L’atterrisseur sur lequel est fixé la plateforme FSS est fourni par la société américaine Draper Laboratories et fabriqué par la société japonaise Ispace.

Il doit transporter différentes charges utiles scientifiques pour effectuer des mesures géophysiques sur la Lune : les sismomètres de la mission FSS, une foreuse pour permettre la mise en place de sondes de flux thermique et de conductivité électrique, et des instruments pour étudier le champ magnétique et l'altération de la surface. 

Le lancement depuis le centre spatial Kennedy aux États-Unis, à bord d'un lanceur Falcon 9, est prévu pour la première moitié de l’année 2026. Cet atterrisseur a la capacité d'amener 300 kg de charge utile sur la surface lunaire et de déployer des satellites relais en orbite pour les communications depuis la face cachée de la Lune.

Il a été spécialement conçu pour que les vibrations propres de la structure et des instruments à bord gênent le moins possible les mesures sismiques lunaires.

 

L’instrument FSS

Situé sur l’atterrisseur SERIES-2, l’instrument FSS comprend deux types de sismomètres : VBB (Very Broad Band) et SP (Short Period).

Ces instruments sont totalement autonomes et poursuivront les mesures sismiques de la Lune pendant au moins 4 mois, alors que l’atterrisseur sur lequel ils sont fixés sera éteint (il n’est pas prévu qu’il survive à une nuit lunaire).

Vue de l'intérieur du cube FSS
Vu ici lors de l'assemblage en novembre 2023, le cube intérieur de la suite sismique FSS abrite la grande batterie de la charge utile (à l'arrière) et ses deux sismomètres. Le dispositif doré en forme de rondelle à gauche contient le capteur © NASA/JPL-Caltech

L’ensemble Farside Seismic Suite (FSS) est contenu dans un cube d’environ 50 cm de côté pour une masse totale proche de 45 kg.

A l’extérieur se trouve un panneau solaire qui alimente un ensemble de batteries internes. Sur le sommet de la structure se trouve une antenne qui, pendant le jour lunaire, pourra communiquer avec deux nanosatellites, mis en orbite avant l’atterrissage et chargés des communications avec la Terre.

Pour survivre à la fois au jour lunaire, où la température peut monter de façon importante et à la nuit, où la température peut être très basse, FSS est constitué de deux cubes imbriqués l’un dans l’autre : un cube extérieur (ci-dessous à gauche) sur lequel sont montés le panneau solaire et l’antenne, et un cube intérieur (ci-dessous à droite), isolé thermiquement du cube extérieur, et dans lequel se trouve toute l’instrumentation.

Schéma éclaté de la suite FSS, cube externe et cube interne
Schéma éclaté de la suite FSS : cube externe et cube interne © CNES

La plaque supérieure (ci-dessus en marron) est un radiateur. Pendant le jour lunaire, une boucle fluide relie le cube intérieur au radiateur et permet d'évacuer les calories produites par l’instrumentation. Pendant la nuit lunaire, la circulation fluide est coupée et le cube intérieur est isolé thermiquement de l’extérieur. La consommation électrique des composants suffit à maintenir la température interne à un niveau acceptable pour les composants.

Vue schématique des instruments de FSS
Vue schématique des instruments de FSS © NASA/JPL/IPGP/Kinemetrics/Oxford University/Imperial College

Le sismomètre VBB

Le sismomètre à très large bande, ou VBB (Very Broad Band), est le sismomètre le plus sensible jamais construit pour l'exploration spatiale. Il est capable de détecter un mouvement proche de la taille d’un seul atome d'hydrogène. Il mesure les mouvements verticaux du sol à l'aide d'un pendule et est accommodé dans un cylindre d'environ 14 centimètres de diamètre.

Il a été construit à l'origine comme instrument de remplacement (« flight spare ») pour la mission martienne InSight par le CNES, et a dû être adapté pour tenir compte des écarts d’environnement entre Mars et la Lune.
En premier lieu, Mars a une atmosphère, contrairement à la Lune. Sur Mars, il a donc fallu encapsuler l’instrument VBB dans une enceinte à vide hermétique pour que les mouvements du pendule ne soient pas amortis.

Sur la Lune, il n’y a pas d’atmosphère, mais le problème vient du régolithe, une poussière minérale extrêmement abrasive et électrostatique (donc collante).
L’enceinte de l’instrument lunaire a donc été conçue en conséquence. Un filtre (billes de titane frittées) a été placé au sommet de l’enceinte afin que l’air puisse s’en échapper mais que la poussière lunaire n’y pénètre pas. 

De plus, les instruments lunaires peuvent être affectés par les variations locales de champ magnétique (notamment lorsque la Lune passe dans la queue de la magnétosphère terrestre, une fois tous les mois). Il a donc fallu mettre en place un blindage magnétique autour de l’instrument.

Enfin, il a fallu légèrement modifier le pendule mécanique afin de tenir compte de l’écart entre gravité Martienne et Lunaire.

Vue schématique du sismomètre VBB
Vue schématique du sismomètre VBB © IPGP

Les sismomètres SP

Les trois sismomètres Short Period (SP) sont des capteurs au design très semblable à ceux qui ont volé sur la mission martienne Insight. 

Ils ont une plage de fréquence de mesure plus large que le VBB tout en ayant des performances moindres. Les deux suites d’instrument sont donc très complémentaires.

Les SP sont, comme le VBB, des pendules mécaniques axiaux, mais d’une conception radicalement différente, puisqu’usinés dans une matrice de silicium.
Ils sont au nombre de trois, positionnés à 120° les uns des autres pour pouvoir avoir accès aux informations sur les ondes sismiques dans toutes les directions.

Les premiers sismomètres SP utilisés sur Mars pour la mission Insight avaient été fournis par l’Université d’Oxford et l’Imperial College de Londres. Pour FSS, les process ont été industrialisés. C’est désormais la société Kinemetrix qui les fournit.

Vue schématique du sismomètre SP
Vue schématique du sismomètre SP © Kinemetrics

Pour la première fois depuis 50 ans, un sismomètre posé sur la Lune va nous permettre de compléter les mesures des missions Apollo et préparer le retour des humains sur notre satellite.

Gabriel Pont

  • Chef de projet FSS

Le saviez-vous ?

Depuis les missions Apollo, on a la confirmation que la Lune « vibre ». Depuis, les scientifiques améliorent en permanence nos connaissances sur la structure interne de la Lune.