FSS en détails

Contexte

Depuis que les missions Apollo (1969 – 1972) ont déposé différents instruments scientifiques à la surface de la Lune, c’est confirmé : notre satellite naturel vibre !

 Les ondes sismiques qui traversent la Lune ont pour principales origines l’impact de météoroïdes ou les « craquements » induits par les forces de marée. Ces phénomènes permettent de mieux comprendre la structure interne de la Lune, son histoire et ses interactions avec la Terre.

Plusieurs sismomètres ont pu travailler en réseau (Apollo 14, 15 et 16), améliorant notablement la qualité des données sismiques transmises à la Terre. Ces données très précieuses sont toujours analysées aujourd’hui.
Malheureusement, tous ces sismomètres ont été déposés sur la face visible de la Lune, dans une région globalement centrée sur l’équateur, ne permettant pas d’étudier notre satellite à l’échelle globale.

L’instrument Farside Seismic Suite (FSS) a été développé au Jet Propulsion Laboratory (JPL) sous l’égide de la NASA dans le cadre du programme « Commercial Lunar Payload Services » (CLPS). Le CNES fournit le sismomètre VBB en collaboration avec l’Institut de Physique du Globe de Paris (IPGP).

L’instrument FSS est composé de 2 sismomètres : un français VBB (Very Broad Band seismometer) et un anglais SP (Short Period). Il sera placé sur l’atterrisseur lunaire SERIES-2 dont la date de lancement est prévue mi-2026. 

L’atterrissage est prévu dans le cratère de Schrödinger (créé par un impact d’astéroïde) proche du pôle Sud, sur la face cachée de la Lune.

Objectifs

  • Mieux comprendre la structure interne de la Lune

  • Étudier les différences entre la face visible et la face cachée

  • Observer la manière dont la croûte lunaire a été altérée par le cratère de Schrödinger

  • Mesurer l’activité tectonique au pôle Sud

  • Mesurer le taux d’impact de micrométéoroïdes proche du pôle Sud

La mission FSS renverra les premières données sismiques de la Lune depuis que les sismomètres du programme Apollo ont été opérés il y a près de 50 ans. Il fournira en outre les premières mesures sismiques de la face cachée de la Lune.

Les objectifs de la mission FSS se divisent en 2 partie : les objectifs scientifiques et les objectifs d’exploration.

 

Objectifs scientifiques

Presque tous les séismes qui ont pu être localisés lors des missions Apollo semblent avoir pour origine la face visible de la Lune. 

Une question demeure : cette particularité est-elle due au fait que tous les sismomètres étaient placés du côté de la face visible de la Lune, l'atténuation des signaux ne permettant pas de détecter ceux générés du côté de la face cachée ? Ou y a-t-il une réelle asymétrie sismique entre les deux faces de la Lune ?

La mission FSS doit permettre de répondre à ces questions puisqu’elle sera posée dans le cratère d’impact de Schrödinger, sur la face cachée de la Lune.

En outre, sa sensibilité grandement améliorée par rapport aux instruments utilisés il y a un demi-siècle par les missions Apollo devrait permettre, cette fois-ci, de détecter des évènements sismiques en provenance de la face visible. FSS pourra ainsi mesurer l’atténuation des ondes sismiques dans le manteau lunaire et préciser les modèles de composition internes de la Lune.

Enfin, le cratère de Schrödinger est un immense bassin d’impact de plus de 300 km de diamètre, provoqué par la collision d’un corps d’environ 35 km de large. L’âge de cet impact a pu être estimé à 3,8 millions d’années. C’est donc un cratère assez récent. En outre, Schrödinger est un des rares endroits sur la Lune où ont pu être observées des traces d’activité volcaniques géologiquement récentes.

La mission FSS a aussi pour objectif d’étudier la manière dont ce gigantesque impact cosmique a pu transformer la structure de la croûte lunaire sous-jacente.

 

Objectifs d’exploration

Dans le contexte actuel de retour de l’Homme sur la Lune, il est important de connaître précisément l’environnement dans lequel ils seront amenés à évoluer et dans lequel il est d’ores et déjà prévu de construire des bases de vie pérennes. 

L’instrument FSS permettra d’évaluer deux des principaux risques à la présence humaine sur la Lune. 

FSS devra tout d’abord quantifier la fréquence et l’intensité des impacts de (micro)météoroïdes sur cette zone du pôle Sud.
Le 13 octobre 2014, le choc d’un micrométéoroïde sur l’orbiteur Lunar Reconnaissance Orbiter (LRO) lors d’une capture de la surface lunaire avait laissé une image zébrée et inexploitable, tant le satellite avait vibré sous un impact estimé plus tard à une vitesse de 7 km/s. Il est important de connaître le nombre et l’énergie de ces impacts pour évaluer les risques et améliorer les mesures de sécurité pour les humains et les infrastructures.

Composé de sismomètres, FSS aura bien sûr comme objectif d’évaluer aussi le risque sismique près du pôle Sud lunaire. Sur Terre, les séismes sont dus principalement à la tectonique des plaques. Rien de tel sur la Lune, où l’on continue d’étudier leur origine potentielle : 

  • contraction de la croûte lunaire causée par son lent refroidissement,
  • effets de marée de la Terre sur la Lune,
  • séismes « thermiques » causés par les contraintes provenant des grands écarts de température sur cet astre entre le jour et la nuit…
Schémas objectifs scientifiques de FSS
Objectifs scientifiques de FSS © NASA/JPL/IPGP/Kinemetrics/Oxford University/Imperial College/CNES

Déroulé du projet

La technologie des deux sismomètres qui composent l’instrument Farside Seismic Suite a été développée à partir d’instruments conçus à l’origine pour l’atterrisseur martien InSight, qui a enregistré plus de 1 300 séismes martiens avant la fin de la mission en 2022. 

Ces instruments ont été adaptés pour fonctionner dans des conditions de gravité lunaire (moins de la moitié de celle de Mars) mais avec l’avantage, sur la Lune, de ne pas être perturbé par les vibrations et les perturbations causés par les vents martiens. C’est d’ailleurs pour cela que FSS n’aura pas besoin d’être déposé directement sur la surface de la Lune mais restera sur l’atterrisseur lunaire SERIES-2. Les vibrations sismiques seront directement transmises à l’instrument FSS par le châssis de l’engin.

Il n’est pas prévu que cet atterrisseur (sur lequel sera fixé FSS mais qui contient aussi d’autres expériences scientifiques) survive à la nuit lunaire de 2 semaines qui suivra son atterrissage. C’est pourquoi FSS dispose de tous les systèmes (panneau solaire, batteries, antenne communicant avec 2 nanosatellites en orbite…) pour pouvoir fonctionner en toute autonomie pendant au moins 3 à 4 mois après que l’atterrisseur soit éteint (avantage : plus aucun autre appareil n’émettra de vibrations parasites).

 

Organisation

La mission FSS, financée par la NASA, est sous responsabilité du JPL. Le CNES, avec l’Institut de Physique du Globe de Paris (IPGP), fournit le sismomètre VBB, envoyé au JPL pour qu’il soit intégré dans l’instrument FSS. En retour, les scientifiques français impliqués dans la mission bénéficient des données qui seront enregistrées tout au long du projet.