Au printemps 2026, Sophie Adenot, astronaute française de l’Agence spatiale européenne (ESA), s’envolera pour Epsilon, une mission de 6 mois à bord de la Station spatiale internationale (ISS). Elle y réalisera une série d’expériences scientifiques et technologiques européennes, parmi lesquelles un programme d’expériences françaises proposé par le CNES dans le cadre de sa contribution nationale. Les expériences françaises sont développées et suivies par le Cadmos, le Centre d’Aide au Développement des Activités en Micropesanteur et des Opérations Spatiales. Depuis Toulouse, ce service du CNES conçoit, développe et assure le suivi d’expériences scientifiques ou technologiques menées en micropesanteur.
Trois objectifs bien spécifiques
Les nouvelles expériences françaises que réalisera Sophie Adenot répondront aux trois objectifs suivants :
Améliorer les connaissances scientifiques, en particulier en physiologie, un domaine d’expertise historique du Cadmos :
- EchoFinder : Cette expérience innovante permet aux astronautes de réaliser des échographies en totale autonomie grâce à un système combinant réalité augmentée et intelligence artificielle, sans expertise médicale préalable ni guidage depuis la Terre. Objectif : valider une technologie essentielle pour les missions lunaires ou martiennes, où les délais de communication rendront la télémédecine depuis la Terre impossible, contrairement à ce que permet l’expérience ECHO du CNES à bord de l’ISS depuis la mission Proxima en 2016. Les applications terrestres incluent les déserts médicaux, les environnements maritimes ou sous-marins. Partenaires : Inserm/UniCaen, CHU Caen Normandie, MEDES.
- PhysioTool : Ce dispositif intègre des capteurs synchronisés mesurant divers paramètres physiologiques (tension artérielle, fréquence cardiaque et respiratoire, saturation en oxygène, activité cérébrale), afin d’assurer à la fois la prise de mesures scientifiques et de contribuer au suivi médical de l’astronaute. Une phase de mesures sera faite sur une journée complète, au travers de capteurs ambulatoires (polysomnographe et imageur spectroscopique proche-infrarouge), avec une phase cognitive active d’une heure, grâce à un boitier de stimulation neurosensorielle. Objectif : valider une nouvelle instrumentation de physiologie ambulatoire en micropesanteur, essentielle pour les futures missions d’exploration habitée. Partenaires : Université et CHU d’Angers, Université de Lorraine, MEDES, Artinis, Somnomedics.
- Echo-Bones : Menée au sol avant et après la mission, cette expérience utilise une nouvelle sonde matricielle pour réaliser des échographies osseuses (tibia), permettant d’étudier l’évolution de l’anatomie, de la densité et du flux sanguin dans les os après une mission de 6 mois en micropesanteur. Objectif : valider cette nouvelle technique d’échographie pour mieux comprendre les modifications osseuses lors des vols de longue durée, avec des applications en rhumatologie terrestre. Partenaires : Hôpital d’Angers, Université de Delft, Inserm, Imasonic, MEDES.
Qualifier de nouvelles technologies pour préparer l’avenir de l’exploration spatiale habitée, notamment vers la Lune et Mars :
- MatISS-4 : Ce dispositif passif permet à la fois de caractériser les contaminants atmosphériques de l’ISS et de repousser ou d’empêcher la croissance des micro-organismes grâce à des surfaces innovantes. Doté de nouveaux traitements de surface et de nouveaux outils d’analyse (fluorescence X, spectroscopie Raman), il est la dernière évolution depuis le premier MatISS développé à l’occasion de la mission Proxima de Thomas Pesquet en 2016. Objectif : concevoir des matériaux anti-microbiens pour les futurs vaisseaux spatiaux et pour des applications terrestres (hôpitaux, transports publics). Partenaires : ENS Lyon, COMAT.
- MultISS : Cet imageur multimodal analyse les bio-contaminations de surfaces à bord de l’ISS, par analyse multi-spectrale et par fluorescence. Objectif : caractériser le développement des contaminants biologiques dans les véhicules spatiaux afin de protéger la santé des astronautes et la durabilité des équipements lors des missions de longue durée. Partenaires : Lumetis, COMAT.
- EuroSuit : Prototype textile de combinaison intra-véhiculaire, EuroSuit sera testé à bord de l’ISS par Sophie Adenot pour en valider l’ergonomie et mesurer sa facilité d’enfilage et de retrait. Objectif : préparer la souveraineté européenne dans l’exploration spatiale habitée, et impliquer de nouveaux entrants non-issus du spatial permettant une synergie mutuellement bénéfique. Partenaires : Spartan Space, Décathlon.
Impliquer la jeunesse dans l’aventure spatiale à travers une expérience éducative visant à susciter leur intérêt pour les carrières scientifiques et techniques :
- ChlorISS : Cette expérience éducative consiste à faire germer, simultanément en micropesanteur à bord de l’ISS et sur Terre, des graines d’Arabette des dames (Arabidopsis thaliana) et de mizuna (Brassica rapa japonica), deux plantes de la famille des brassicacées. Sophie Adenot mènera ainsi cette expérience dans l’espace pendant que des milliers de classes, du primaire au lycée, reproduiront l’expérience au sol. ChlorISS connectera jusqu’à 4500 établissements scolaires à la mission de Sophie Adenot en leur proposant d’observer l’influence de la lumière et les effets de la gravité sur la germination et la croissance des plantes. Objectif : intéresser les jeunes aux disciplines scientifiques et susciter des vocations.
En savoir plus sur l'expérience ChlorISS
Partenaires : Sorbonne Université, le ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche et le ministère de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire.
La reprise d'expériences françaises déjà à bord
Sophie Adenot opérera également des expériences françaises déjà à bord, telles que :
- Lumina : Ce dosimètre à fibre optique vise à démontrer la fiabilité de ce composant comme outil de mesure des radiations ionisantes, technologie indispensable à la protection des astronautes et du matériel dans la perspective des voyages spatiaux lointains. Il a été développé et monté à bord de l’ISS à l’occasion de la mission Alpha de Thomas Pesquet en 2021, et est toujours opérationnel. Partenaires : Laboratoire Hubert Curien, Exail, CERN.
- FoodProcessor : Ce robot culinaire permet de valider des fonctions élémentaires de la préparation alimentaire en micropesanteur, dans la perspective des missions de longue durée. Une première recette réalisée en 2023 par l’astronaute ESA Andy Mogensen avait validé le foisonnement. Une deuxième recette, appelée « duo méditerranéen », combinant caviar d’aubergine et houmous, utilisera cette fois-ci des aliments qui pourraient un jour être produits à bord. Ces nouveaux consommables seront montés à bord de l’ISS dans un emballage protecteur contenant des éléments comestibles et biodégradables, comme les expériences Edible/Renewable Foam de la mission Alpha de 2021. Partenaires : MEDES, COMAT, Inneolab, Groupe Jean Hénaff, Compositic, Triballat Noyal, Innovons à 360, Andros.
- EveryWear : Cette application mobile évolutive collecte, via un iPad et des capteurs connectés, des données médicales et scientifiques, comme le suivi nutritionnel, la prise médicamenteuse, ou le suivi d’expériences de physiologie au moyen de questionnaires, et fournit une messagerie privée entre les astronautes et l’équipe médicale au sol. Développée à l’occasion de la mission Proxima en 2017, elle est désormais utilisée par la quasi-totalité des équipages. Partenaire : MEDES.
Le Cadmos, centre d’excellence de l’exploration spatiale européenne
Créé en 1993, le Cadmos s’appuie sur plus de 40 ans d’expérience acquise au fil des missions et des coopérations internationales, depuis le premier vol habité français en 1982. En tant que centre européen de support aux opérations de l’ISS, il excelle dans la préparation, le suivi et l’analyse des expériences en micropesanteur. A ce titre, le Cadmos opèrera une trentaine d’autres expériences pour le compte de l’ESA pendant la mission εpsilon. Ses infrastructures de pointe, incluant laboratoires et salles de contrôle, ainsi que sa collaboration avec le Medes pour la physiologie spatiale, font du Cadmos un acteur clé de l’exploration spatiale européenne.