Chalon-sur-Saône, a tiré son dynamisme de sa position de carrefour, véritable relais le long de l’axe Rhin-Rhône via la Saône autour de laquelle s’est construite la ville. Aujourd’hui, néanmoins, comme beaucoup d’autres villes moyennes françaises, elle apparaît moins attractive et le pôle industriel d’hier a laissé place à une ville en reconversion à laquelle les acteurs politiques souhaitent redonner un second souffle.
Légende de l’image satellite
Cette image a été prise par un satellite Pléiades le 25/01/2016. Il s’agit d’une image en couleurs naturelles, de résolution native à 0,70m, ré-échantillonnée à 0,5m
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Repères géographiques
Présentation de l’image globale
Chalon-sur-Saône, une ville-carrefour née du fleuve
Comme l’illustre l’image, Chalon-sur-Saône est une ville née d’une rivière, la Saône, qui coule du nord au sud avant de se jeter dans le Rhône dont elle est le principal affluent. Première aire urbaine de Saône-et-Loire, elle s’insère dans un réseau urbain dominé par Dijon au nord et par Lyon au sud. Bien reliée à ces deux métropoles et pôles économiques majeurs, elle peine aujourd’hui à tirer tous les bénéfices d’une situation qui, hier, faisait son attractivité.
Une ville de transit au cœur du Val de Saône
Chalon bénéficie de véritables atouts, dans la mesure où sa position centrale, sur un axe de communication majeur en fait un passage obligé pour les flux Nord-Sud ou Sud-Nord. Sur l’image satellite, on peut ainsi noter, à l’ouest, les lignes de chemin de fer, mais aussi l’autoroute A6, ainsi qu’une départementale qui longe la Saône en direction de Lyon. La ville est aussi bien reliée aux principales aires urbaines qui l’entourent, on peut penser notamment à la N80 au sud-ouest de l’image qui permet aux Chalonnais de rejoindre le Creusot en 40 minutes, ou la gare TGV de Montchanin en 35 minutes.
En effet, le réseau urbain dans lequel s’inscrit Chalon-sur-Saône est fait de complémentarités et d’interrelations parfois anciennes tissées entre les aires urbaines du département ou de la région. On peut penser à Montceau-les-Mines mais également Le Creusot, autour des activités industrielles, ou encore à Mâcon, préfecture de Saône-et-Loire, et enfin Beaune, dans le département limitrophe de Côte d’or. Les mobilités pendulaires (domicile-travail) sont importantes entre ces aires urbaines et sont facilitées par les axes routiers et autoroutiers (notamment entre Montceau-les-Mines, Le Creusot et Chalon-sur-Saône) mais aussi par le train (on peut penser à l’axe Lyon, Mâcon, Chalon-sur-Saône, Beaune, Dijon) emprunté par beaucoup de navetteurs qui travaillent dans le tertiaire. En revanche, il est à noter que Chalon est mal relié à Paris, le TGV n’y passe plus depuis quelques années et les Chalonnais doivent se rendre à la gare TGV de Montchanin (illustration d’un effet tunnel) afin de pouvoir rejoindre rapidement la capitale.
Enfin le tropisme de Chalon-sur-Saône est limité à l’échelle de la région Bourgogne-Franche-Comté. Si la concentration des principales fonctions urbaines permet à la ville de rayonner sur sa périphérie proche jusqu’aux communes rurales de Bresse et aux marges orientales du Morvan, les aires urbaines des autres départements de la région semblent être davantage tournées vers l’extérieur. Ces dernières sont davantage structurées par le tropisme de Paris pour le nord-ouest de la région et par celui de Clermont-Ferrand pour le sud-ouest. Il en va de même pour l’est de la région davantage tourné vers les régions limitrophes de l’est et les espaces frontaliers.
Une ville-carrefour avec pour matrice la Saône
L’image de Chalon-sur-Saône donne à voir un grand nombre d’héritages historiques dont la plupart témoigne d’un usage renouvelé de la Saône. En effet, pendant des siècles, cette dernière a été la principale voie de communication par où transitaient les marchandises, faisant de Chalon un ville-étape majeure.
La batellerie s’y est développée dès l’Antiquité et a su s’adapter aux innovations techniques notamment avec l’apparition des bateaux à vapeur lors de la première révolution industrielle, les frères Schneider développant en 1839 des chantiers navals sur la rive gauche de la Saône (zoom 2 et 5). La mise en service de lignes de chemin de fer à partir de 1849 et la multiplication des axes routiers au XXème siècle, vont néanmoins faire progressivement diminuer le poids de la Saône dans la structure urbaine chalonnaise.
Aujourd’hui, le rapport à la rivière est à réinventer et les acteurs politiques ont fait le choix de valoriser la dimension paysagère et patrimoniale. On peut penser aux réaménagements récents des quais et de la place du Port-Villiers (zoom 1) permettant d’ouvrir davantage la ville à la Saône.
Atouts et contraintes d’un site fluvial
Si le site de Chalon offre des atouts, il n’en reste pas moins marqué par des contraintes. En effet, Chalon-sur-Saône est une ville touchée très régulièrement par les inondations. Elle se dresse dans la vaste plaine alluviale de la Saône où cette dernière serpente en formant de nombreux méandres dans un lit majeur étendu comme on peut le voir sur l’image satellite.
Il en résulte un développement spécifique, opposant les deux rives. Si la rive droite de la Saône a abrité la majeure partie de la ville depuis sa création au Ier siècle avant J.-C., la rive gauche a été développée de façon plus tardive principalement à partir du XIXème siècle autour de l’activité industrielle, notamment les chantiers navals qui nécessitaient une emprise spatiale forte et une proximité immédiate de la Saône. Longtemps, la rive gauche de la Saône est restée rurale comme en témoigne la présence des Granges Forestiers sur lesquelles est d’ailleurs indiqué le niveau des principales crues qu’a connu la ville ces dernières décennies.
L’étalement urbain s’est ainsi fait principalement vers le nord et dans une moindre mesure de part et d’autre de l’enceinte médiévale bien visible sur l’image. On notera néanmoins, l’aménagement précoce de l’île Saint Laurent, enserrée entre la Saône et un de ses bras, la Génise, qui eut longtemps un rôle d’interface (au IXème siècle entre le royaume de France et le Saint Empire romain germanique ou encore, plus récemment, de 1940 à 1942, l’île se trouvant au bord de la ligne de démarcation) et où se sont développés des activités spécifiques qu’il était nécessaire d’isoler de la ville, on peut penser à l’hôpital dès le XVIème siècle avec la mise en quarantaine de certains malades.
Comme, on peut le voir sur l’image, la Saône a été grandement aménagée notamment à travers la mise en place des quais ou encore avec la création d’îles artificielles dans la deuxième moitié du XIXème siècle comme les îles de La Benne-la-Faux, en aval du centre-ville, après le pont des Dombes, qui permettait de réduire la largeur du lit de la rivière afin de sécuriser la navigation dangereuse dans cette zone.
De même, sur la rive gauche de la Saône, à l’est de l’île Saint-Laurent, on peut noter sur l’image satellite un bras parallèle à celui de la Génise. Ce dernier, le bras des Chavannes, est artificiel et a été mis en place à la fin du XVIIIème siècle pour compenser le rétrécissement du lit de la Saône au niveau des quais, puis élargi au milieu du XIXème siècle pour augmenter son débit lors des inondations.
Ainsi, la Saône impose une occupation des sols spécifiques. On peut noter que le tissu urbain est, en grande partie, discontinu entre les 15,2 km2 de la ville de Chalon-sur-Saône et les communes périphériques. En effet, nombreuses sont les zones non constructibles, on peut penser aux prairies inondables autour de la Thalie à l’ouest de l’image ou encore la rive gauche de la Saône en amont du centre-ville, où les activités agricoles et de loisirs ont été préférées à d’autres aménagements plus sensibles aux crues.
Si la Saône impose son rythme à la ville de Chalon, il en va de même pour les aménagements liés à sa présence. En effet, le nombre peu important de ponts entraîne une saturation des axes de transport aux heures de bureaux (l’autoroute n’est pas concernée, passant comme on peut le noter sur l’image à l’ouest de la ville).
Chalon-sur-Saône, un « territoire qui perd » (DAVEZIES L., 2008).
Depuis les années 1980, le système productif chalonnais est en profonde mutation. Les emplois liés à l’industrie, qui faisaient hier la renommée de Chalon, ont disparu ou sont de plus en plus menacés. On peut penser à la disparition du Creusot-Loire en 1984 implanté sur la rive gauche de la Saône, au niveau des chantiers du Petit Creusot, site historique des Schneider (zoom 2), à l’entreprise Kodak dont le site chalonnais a été détruit en 2007 quelques années après sa fermeture, ou encore plus récemment Areva Nuclear Power (avant de redevenir Framatome en 2018), obligée de licencier une partie de ses salariés.
Les activités de services (principalement dans le secteur de la santé ou des administrations), en augmentation timide, ne parviennent pas à compenser ces pertes d’emplois. Aujourd’hui, à l’image de beaucoup d’autres villes moyennes, la sphère présentielle représente plus des 2/3 des postes salariés. De moins en moins attractive pour les actifs, la ville connait aussi un vieillissement de sa population.
L’âge d’or des Trente Glorieuses, présent dans les mémoires, semble ainsi révolu. En 1975, la commune de Chalon-sur-Saône comptait 58 00 habitants, son maximum historique, notamment grâce aux apports migratoires nécessaires à l’industrie mais aussi grâce au baby-boom. Ce dynamisme démographique donnera lieu à l’aménagement d différents quartiers visibles sur l’image comme les Aubépins au nord (zoom 4) ou encore le quartier des Prés Saint-Jean (zoom 3) à l’est du centre-ville.
Cette progression va cesser lors des Trente Piteuses et Chalon va connaître une lente hémorragie de sa population qui va s’accélérer à la fin des années 1990 pour arriver aujourd’hui au chiffre de 45 400 personnes. Ainsi en quatre décennies, c’est plus de 20 % de la population qui est perdue pour ce qui reste la première ville du département de Saône-et-Loire. Ces caractéristiques démographiques viennent renforcer l’image d’une ville tournée vers le passé, représentation que les acteurs politiques locaux tentent d’infléchir notamment par des opérations de marketing territorial.
Enfin, la perte d’attractivité du centre est amplifiée par la périurbanisation. L’ensemble de la population des communes périurbaines dépasse aujourd’hui celle de la ville-centre. La première couronne de communes périurbaines est d’ailleurs bien visible sur l’image.
L’image satellite illustre ces processus en cours mais aussi les efforts de reconversion récents que nous mettrons en évidence à travers l’analyse de cinq agrandissements de l’image.
Zooms d’étude
Le centre-ville : patrimonialisation et adaptation à la demande sociale chalonnaise.
Cœur médiéval patrimonialisé et la dynamique touristique
Comme on peut le noter sur l’image satellite, le lacis des rues médiévales structure le centre-ville de Chalon. L’étroitesse des rues et la valeur patrimoniale d’un grand nombre de bâtiments ont conduit l’équipe municipale à piétonniser la partie de la ville située à l’intérieur de la première enceinte datant de l’époque gallo-romaine. Il s’agit là de redynamiser la ville autour du tourisme. En effet, des bateaux de croisière font escale régulièrement à une centaine de mètres en aval du pont Saint Laurent qui relie le centre-ville à l’île du même nom.
Il s’agit de faire de Chalon, une ville étape dans l’offre proposée par les voyagistes qui, la plupart du temps, n’utilisent Chalon que pour ses quais avant d’emmener les touristes en bus vers la Côte de Beaune et Nuits-Saint-Georges, oubliant au passage les vins de la côte chalonnaise à l’ouest de la ville. Au-delà de ce cœur de ville, le bâti reste dense dans une zone qui correspond à l’emprise spatiale délimitée par les fortifications successives des époques médiévale et moderne.
Un développement industriel précoce aux héritages nombreux en centre-ville
Au nord du cœur de ville patrimonialisé, on peut noter un espace dépourvu de bâtiment et duquel part un axe routier horizontal. Il s’agit là de la place de la République créée après comblement d’un bassin, celui de l’Obélisque qui avait été construit à la fin du XVIIIème siècle. Cette place donne sur un boulevard du même nom, le boulevard de la République où subsistent des immeubles bourgeois de la deuxième moitié du XIXème siècle, témoignage de l’enrichissement de l’élite urbaine de l’époque.
De la même façon, à l’ouest du centre-ville dans le prolongement du pont Jean-Richard (premier pont en partant de l’ouest sur l’agrandissement) se dresse une avenue suivant un axe sud-nord qui est aujourd’hui très emprunté car permettant de rejoindre l’autoroute. Il s’agit là de l’ancien tracé du canal du centre qui permettait de relier la Saône et la Loire et qui a renforcé la position de carrefour de Chalon-sur-Saône à la fin du XVIIIème siècle.
Des aménagements récents : garder et attirer la population
En périphérie immédiate du centre-ville, à l’est, on trouve des infrastructures récentes qui répondent à une demande sociale et qui s’inscrivent aussi dans la volonté pour les élus de Chalon-sur-Saône d’attirer ou de garder les ménages actifs. On peut penser aux deux bâtiments circulaires visibles sur l’image qui correspondent respectivement au complexe sportif Le Colisée, construit au début des années 2000 pour accueillir l’équipe de basketball de la ville (et pour laquelle l’entreprise Areva a servi de mécène) et le parc des expositions. Il en va de même pour l’espace nautique, au sud du complexe évoqué précédemment, qui donne sur la Saône et qui permet aux habitants de la ville de renouer avec des pratiques récréatives d’antan.
Enfin cette analyse du centre-ville permet de mettre en lumière une contrainte majeure pour les Chalonnais : le nombre peu important de ponts qui entraîne une saturation des axes de transport aux heures de pointe. Au pont historique, à savoir le pont Saint-Laurent qui relie l’île du même nom au reste de la ville et au pont Jean-Richard plus en amont, est venu s’ajouter le pont de Bourgogne, qui permet depuis 1992 de contourner la ville et d’accéder aux zones industrielles de l’est et du nord.
L’ancien cœur industriel le long de la Saône : reconversion et mutations du système productif
Une extension de la ville, héritage de la première révolution industrielle
Cette extension de la ville vers le sud-ouest est l’héritage de la première révolution industrielle. En effet, comme évoqué précédemment, on trouve dans cette zone à la fois le canal du Centre (comblé et devenu une avenue en 1954), la proximité immédiate de la Saône mais aussi les voies de chemin de fer qui se développe précocement (dès 1849).
Aussi, les chantiers Schneider (chantier naval) vont s’établir dès 1839 sur la rive gauche de la Saône et construire un pont, le pont des Dombes, qui relie par train la rive gauche au réseau ferré principal en 1870. Ce site industriel des Schneider, appelé chantiers du Petit Creusot, va avoir un rôle très important du XIXème siècle jusqu’à sa fermeture dans les années 1980. Le site est alors repris par Framatome (zoom 5).
Le quartier Saint-Cosme : friches industrielles et patrimonialisation
Sur la rive droite de la Saône, dans le quartier Saint-Cosme (du nom de l’ancienne commune sur laquelle la ville s’est étendue), les bâtiments industriels n’ont pas été réinvestis par d’autres acteurs industriels et sont les illustrations des mutations du système productif. On peut penser à l’ancienne sucrerie (1861), dont la réhabilitation avec notamment le maintien des briques rouges et des charpentes métalliques donne aujourd’hui une valeur patrimoniale forte au lieu.
La ville de Chalon, qui a racheté le bâtiment en 1990, et la communauté d’agglomération ont ainsi mis en œuvre depuis une dizaine d’année un programme de réhabilitation et de construction de bâtiments notamment Nicéphore Cité, centre qui encourage les projets liés aux technologies de l’image et du son. Il s’agit également à travers la mise en place d’une pépinière d’entreprises d’encourager le développement de nouvelles activités. On peut penser au siège régional de KPMG qui y trouve là un intérêt avec la proximité de la gare au nord et de l’accès à l’autoroute A6 par le sud.
Enfin, l’abattoir municipal, construit en 1865, est aujourd’hui réinvesti par des artistes et est un lieu d’expression pour les arts de la rue. Il s’agit aussi de créer un lien entre cet espace périphérique et le centre-ville qui accueille tous les étés depuis 1986 le premier Festival français de théâtre de rue.
Faible densité du bâti et risque d’inondation
Cette image est aussi remarquable dans la mesure où les ensembles spatiaux y sont particulièrement bien délimités. Aussi, on note au centre du zoom un espace non bâti, principalement des pâtures qui témoignent de la dynamique hydrographique et des inondations fréquentes de cette marge chalonnaise. Aussi les quartiers résidentiels ne jouxtent pas les voies ferrées quartier, à l’instar de la cité-jardin des Charreaux, sur l’angle nord-ouest du zoom, voulue par l’office municipal d’habitations à loyer modéré en 1926.
Enfin, la faible densité du bâti et la proximité des axes routiers ont rendu cet espace attractif puisque s’y concentrent des services hospitaliers et paramédicaux (nouvel hôpital à moins d’une décennie) autour d’un petit plan d’eau artificiel que l’on distingue au centre du zoom et qui rappelle les contraintes majeures du site, à savoir le risque d’inondation. Il s’agit également ici d’offrir à l’ensemble des habitants des communes limitrophes et parfois plus lointaines un accès plus rapide à l’hôpital qui se trouvait autrefois sur l’île Saint-Laurent.
Le quart nord-est de Chalon : résilience de l’industrie et de l’activité portuaire ?
Le port Nord : friches et reconversion
Ce zoom permet de mettre en évidence un deuxième ensemble spatial marqué par l’industrie et qui témoigne de l’expansion de la ville au cours du XXème siècle. Au sud du zoom, on peut voir sur la rive droite de la Saône, le port nord, friche industrielle, héritage des infrastructures portuaires de la première moitié du XXème siècle.
Il est aujourd’hui réinvesti par un collectif artistique et y subsistent encore quelques entreprises. Cet espace apparaît ainsi comme le pendant de l’espace artistique structuré autour de l’Abattoir évoqué précédemment (zoom 2) et vient donner de la cohérence au projet d’une ville qui tente d’exister à travers une offre artistique importante.
La zone industrielle nord : une densité importante d’entreprises malgré la crise
Au nord du zoom, on peut voir un canal qui a été mis en place, il s’agit du nouveau tracé du canal du Centre (le premier ayant été comblé pour laisser place à une avenue), mis en service au milieu du XXème siècle. On y trouve une zone industrielle majeure pour la ville, puisque se succèdent de façon linéaire bon nombre d’entreprises jusqu’à la zone industrielle de Chalon Nord.
Au nord (hors cadre), sur la commune limitrophe de Champforgeuil se trouvait l’entreprise Kodak, un employeur majeur de la ville dans les années 1990. Il a fermé ses portes dans les années 2000 face à la concurrence du numérique (symboliquement le site est détruit en 2007). Aujourd’hui, on y trouve d’autres entreprises comme Vertech, spécialisée dans la fourniture de logiciels.
Des inégalités socio-spatiales marquées : le quartier des prés Saint-Jean et les espaces récréatifs de l’est chalonnais.
Cet agrandissement permet aussi de voir de façon plus fine comment la ville s’est étendue avec la mise en place de la Zone d’Aménagement Concerté (ZAC) du Plateau Saint-Jean dans les années 1970. Celle-ci illustre une rupture avec les tentatives urbanistiques précédentes (voir la cité des Aubépins, zoom 4) en proposant des formes moins marquées par les barres et les tours et laissant beaucoup d’espaces entre les bâtiments autour desquels on trouve davantage d’espaces verts mais aussi des commerces et un centre commercial.
Enfin, ce quartier, distinct du reste de la ville, est bordé à l’est par un lac artificiel, espace tampon entre les usines des bords du canal et les logements des prés Saint-Jean. Ce quartier principalement pensé pour accueillir la main d’œuvre de l’industrie est touché par le chômage, surtout depuis les années 1980.
Enfin à l’est du zoom, on peut distinguer des champs - il s’agit là d’une zone inondable et inconstructible - mais également des espaces récréatifs véritables marqueurs socio-spatiaux. En effet, on distingue le port de plaisance et le golf, destiné à la classe supérieure chalonnaise, du reste de la zone de loisirs, plus populaire où les familles les plus modestes viennent faire un barbecue ou utiliser les terrains de sports collectifs.
Le nord-ouest : le poids des héritages industriels de la première moitié du XXème siècle.
L’axe autoroutier, facteur essentiel du maintien de certaines activités à Chalon.
Aujourd’hui, Chalon mise avant tout sur sa position stratégique en bordure de l’autoroute Dijon-Lyon, axe national majeur de communication. De nombreuses entreprises ont ainsi fait le choix de s’implanter en bordure de l’embranchement autoroutier au nord.
Il en va de même pour l’accès à l’autoroute par le sud de Chalon où la firme Amazon a installé il y a un an un très grand entrepôt (hors cadre). De la même façon, on trouve en bordure des échangeurs routiers et de l’accès à l’autoroute par le nord, un centre commercial important.
De l’autre côté de la route un ensemble industriel bien délimité se distingue. Il s’agit du site de l’usine Saint-Gobain, un acteur économique majeur pour la ville, autour duquel se greffe d’autres entreprises comme Verallia, spécialisée dans la production de bouteilles. L’accès à l’axe autoroutier nord-sud que représente l’A6 est ici un facteur essentiel au maintien de ces entreprises sur le territoire chalonnais.
Permanences et mutations des paysages urbains
Cet agrandissement permet aussi de mettre en évidence les différentes politiques du logement menées lors des périodes fastes de la ville. En effet, le site de l’usine Saint-Gobain est bordé au sud par un quartier résidentiel de maisons jumelées avec des petits jardins, il s’agit de la cité Saint-Gobain mise en place dans les années 1910-1920.
Au centre du zoom, à l’est de l’avenue de Paris, qui est l’axe vertical principal qui scinde l’image en deux, on peut noter autour des quartiers résidentiels un espace en creux qui correspond aux jardins familiaux chalonnais. Ces derniers ont été mis en place par les néo-urbains chalonnais qui quittaient la campagne pour s’installer en ville au moment des différentes vagues d’industrialisation de la ville. Aujourd’hui, ces jardins sont réinvestis par des populations non plus plus nécessairement ouvrières, mais davantage en recherche d’un rapport direct avec la « nature » en ville.
Enfin, au sud du zoom, à l’ouest de l’avenue de Paris, on distingue des barres qui correspondent à la cité des Aubépins, ZUP (Zone à Urbaniser en Priorité) sortie de terre entre 1956 et 1961. Elle connait aujourd’hui de profonds bouleversements à travers des projets de rénovation urbaine (la destruction de barres et de tours a commencé au printemps 2018).
De l’industrie lourde à la haute technologie : la rive gauche de la Saône, « presqu’île du nucléaire »
De l’industrie lourde initiale à la haute technologie
Si le site de Chalon-sur-Saône et la commune de Saint-Marcel ont été choisis par Framatome - devenue par la suite Areva Nuclear Power, puis à nouveau Framatome depuis 2018 - pour établir ses usines dans les années 1970, c’est grâce à l’héritage industriel du territoire chalonnais, qui comme nous l’avons vu précédemment, avait une forte tradition métallurgique.
Aussi, le site des chantiers du Petit Creusot, et plus largement l’ensemble de la zone industrielle du sud de Chalon, sur la rive gauche de la Saône, vont se spécialiser dans la construction de pièces mécaniques de très haute précision et de grande valeur pour les centrales nucléaires. L’image satellite donne donc à voir la résilience de l’industrie permise par l’intégration du territoire chalonnais au système productif du nucléaire civil. Il en va d’ailleurs de même pour la ville du Creusot, qui maintient ainsi ses liens d’interdépendance avec Chalon.
Une « presqu’île », vitale pour le territoire chalonnais
L’effet cluster est bien visible sur l’image. Il est d’ailleurs renforcé par le méandre de la Saône et la très grande darse, d’orientation nord/sud, mise en place pour permettre aux bateaux transportant les pièces de grande taille d’être chargés plus facilement. Elle isole cette zone industrialo-commerciale du reste de l’agglomération.
Principal employeur industriel de la ville avec Saint Gobain, le secteur nucléaire a connu des réductions d’emplois ces dernières années (- 11 %/dix ans). En effet, la concurrence internationale au niveau de l’industrie électronucléaire mais également la restructuration du marché à l’international, due notamment à la catastrophe de Fukushima au Japon en 2011, ont eu un impact sur la population active de l’aire urbaine.
Dans ce contexte, un pôle de compétitivité a été créé en 2005, dénommé pôle de compétitivité Nuclear Valley depuis 2017, qui met en lien d’autres acteurs présents sur cette rive gauche de la Saône. On pense notamment à l’IUT ou encore à la Chambre de Commerce et d’Industrie. Ce pôle, dont le siège est à Chalon-sur-Saône, se veut le nœud principal d’un réseau national des acteurs industriels de la filière nucléaire.
Axes de communication et effets d’entraînement
Autour des installations de l’industrie nucléaire ont été mise en place des voies rapides pour permettre notamment une meilleure communication avec les forges du Creusot. Ces voies rapides ont permis le développement d’une large zone commerciale, facilement accessible notamment pour les habitants des communes périurbaines qui se trouvent sur la rive gauche de la Saône, accentuant ainsi le déclin des commerces du centre-ville.
Références et compléments bibliographiques
CLAVAL Paul, Atlas et Géographie de la Haute Bourgogne et de la Franche Comté, Flammarion, 1978
DAVEZIES Laurent, La République et ses territoires : la circulation invisible des richesses, Seuil, 2008
MEYER Teva, « L’industrie électronucléaire française : dynamiques géographiques d’un système productif privilégié », Revue Géographique de l’Est, vol.54/1-2, 2014.
LECLERC E., « Les industries de Chalon-sur-Saône », Revue de géographie de Lyon, vol. 35, n°2, 1960, pp. 121-156.
Contributeur
Benjamin LECLERE, agrégé et docteur en géographie, professeur en CPGE au lycée Pontus de Tyard (Chalon-sur-Saône, académie de Dijon).