En plein océan Pacifique, Bora Bora appartient à l’archipel de la Société, un alignement d’îles orienté sud-est/nord-ouest qui comprend tous les types d’îles issues d’un point chaud (îles hautes, presque-atolls, atolls). Il constitue un des cinq archipels de la Polynésie française. Il est lui-même divisé en deux sous-ensembles. Au sud-est, les Îles du Vent (Tahiti, Moorea, Maiao, Mehetia) sont les plus jeunes et les constructions récifales y sont moins développées qu’au nord-ouest, dans les Îles Sous-le-Vent (Bora Bora, Huahine, Maupiti, Raiatea, Tahaa…). Bora Bora se situe à 250 km de l’île principale, Tahiti. Bora Bora a connu de profondes transformations démographiques, sociale et économiques. Devenue une des figures les plus emblématiques de la touristification des îles tropicales, la « perle du Pacifique » est aujourd’hui confrontée à de nombreux défis.
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Présentation de l’image globale
Un presque-atoll de l’archipel de la Société en Polynésie française
Bora Bora est une île de petite taille (29 km²). Il s’agit d’un presque-atoll constitué d’un chicot basaltique, dont le point culminant est à 727 m, et d’une couronne récifale, soulignée par une succession d’îlots coralliens, les motus, qui se déploient au nord et à l’est.
Comme le montre l’image, au nord se trouve motu Mute, sur lequel se trouve l’aéroport, à l’ouest et au nord de la passe (Teavanui) motu Tevairoa, au sud-ouest motu Toopua, qui constitue la partie occidentale de l’ancienne caldeira, au sud-est motu Pitiaau qui dessine une très étroite bande de terre et, enfin à l’est motu Tofari et motu Ome. Au nord-est de l’île principale s’identifie la baie de forme rectangulaire de Faanui, alors qu’au sud-est la baie de Povai correspond au cœur de la caldeira. Entre relief basaltique et couronne récifale, le lagon de Bora Bora est presque trois fois plus vaste que l’île (78 km²).
Les variations de profondeur expliquent les différentes couleurs de son lagon, qui contribuent à son succès (indigo foncé lorsqu’elle est importante, pastels du bleu et du vert ailleurs), tout comme sa faune (coraux et poissons).
Des GI’s aux touristes
Bora Bora est aujourd’hui l’île où la pression touristique est la plus forte de toute la Polynésie française, concentrant 36 % des nuitées hôtelières en 2017, devant Tahiti (34 %) et Moorea (23 %). En 2016, elle a accueilli 121 000 touristes, soit deux touristes sur trois se rendant en Polynésie française. Il s’agit d’une destination presque incontournable pour les Européens et les Étatsuniens visitant cette collectivité d’outre-mer.
Révélée par Alain Gerbault (1893-1941) dans les années 1930, elle devient une importante base aérienne et de ravitaillement étatsunienne pendant la Seconde Guerre mondiale. A ce titre, elle fut dotée des premières pistes d’aviation de toute la Polynésie française, l’une de 1 800 m pour les bombardiers, l’autre de 900 m pour les chasseurs. Toutes deux asphaltées, elles étaient situées, comme le montre l’image, sur le motu à l’extrême nord. Elle est aujourd’hui utilisée à des fins civiles. Avec 290 000 passagers en 2017, l’aéroport de Bora Bora est le 38e aéroport national et le 9e d’outre-mer. Il constitue la porte d’entrée principale.
Servi par l'épisode de l'occupation étatsunienne, le mythe a pris de l'ampleur depuis. Le premier hôtel à ouvrir ses portes, en 1961, est le Bora Bora, au sud de l’île. Pour la première fois en Polynésie française, on construit des bungalows sur l’eau. Quelques années plus tard, un second ensemble hôtelier sort de terre, repris par le Club Méditerranée ensuite. En 1973, 15 000 touristes fréquentent Bora Bora, soit le cinquième environ du flux touristique total du Territoire. Les deux tiers des emplois sont déjà directement ou indirectement liés au tourisme.
La relocalisation de l’hébergement ou la conquête des périphéries
Les deux premiers établissements sont relativement proches de Vaitape, le bourg de l'île. Celui-ci bénéficie d’une situation favorable, face à une grande passe et sur un lagon profond, offrant donc un bon mouillage aux navires de haute mer, notamment aux paquebots de croisière visible sur l’image.
Mais, contrairement à de nombreuses représentations, le site est sans plage, de même que la plus grande partie du littoral de Bora Bora hormis les motus. Dans les années 1980, on assiste donc au glissement de l’hébergement vers la pointe Matira, située à l’extrémité sud. C’est en effet le seul lieu possédant des plages de sable blanc, en dehors des motus. En 1987, ce secteur détient plus de 60 % de la capacité totale d'accueil de l'île. A partir de la fin des années 1990 apparaît un embryon de station touristique dans le secteur de la pointe Matira. On y assiste à la multiplication de maisons individuelles, de snacks et restaurants, de boutiques artisanales, de loueurs de vélos, de scooters ou de quads, d’entreprises proposant des excursions ou d’hébergements chez l’habitant, etc.
Dans ce contexte, les plus grandes chaînes hôtelières (Starwood, Accor, Hilton, Intercontinental…) optent pour les îlots inhabités, spécialement ceux à l’est. Comme le montre l’image, elles y construisent une série de jetées, aux formes plus ou moins simples, sur lesquelles sont construits des bungalows sur pilotis qui deviennent un marqueur architectural et paysager dont le modèle d’organisation est connu dans le monde entier.
Mais une fréquentation irrégulière et des investissements hôteliers plus guidés par les opportunités de défiscalisation que par un souci de rentabilité expliquent un recul de l’offre hôtelière et la multiplication de friches touristiques ces dernières années.
Boom démographique et mutations sociales, économiques et paysagères
Le tourisme a provoqué une croissance démographique très forte, bien supérieure à la moyenne de la Polynésie française. Entre 1971 et 2017, la population de cette dernière a augmenté de 142 %, celle de Bora Bora a presque quintuplé (+ 378 %), passant de 2 215 à 10 605 habitants.
La mono-activité touristique s’amplifie. En 2015, presque trois emplois sur quatre (72 %) relèvent du tourisme. La « perle du Pacifique » doit s’accommoder de ce boom touristique et démographique et, pour certains, le mythe ne colle plus à la réalité : les bungalows sur pilotis constituent désormais un élément très visible du paysage ; le littoral s’artificialise ; les engins à moteur sillonnent bruyamment le lagon ; les raies ont rendez-vous à heures fixes pour leur repas à la plus grande satisfaction des touristes qui assistent au spectacle…
Zooms d’étude
L’aéroport au nord de l’île
Comme dans de très nombreuses îles tropicales, les liaisons aériennes jouent un rôle majeur dans la connexion de ces territoires très isolés et éparpillés aux îles principales organisant les archipels. Installée sur le motu à l’extrême nord de l’île, la piste aérienne est liée à la création d’une importante base militaire par les Etats-Unis pendant la Seconde Guerre mondiale dans le cadre de leur lutte contre l’hégémonie impériale japonaise. Boa Bora accueillit ainsi la première piste d’aviation de toute la Polynésie française.
Aujourd’hui, ces installations sont utilisées à des fins civiles, cet aéroport constituant la porte d’entrée principale dans l’île. Les installations sont constituées d’une seule piste, d’une aérogare et d’un embarca
Vaitape, un bourg disposant de nombreux atouts
Situé sous le vent du point culminant (727 m), Vaitape est le principal bourg de l'île. Il bénéficie en effet d’une situation et d’un site très favorables. Premièrement, il fait face à une grande passe, la seule de l’île, qui met en contact le grand lagon intérieur avec la haute mer. Deuxièmement, son site de lagon profond offre un bon mouillage aux navires de haute mer, notamment aux paquebots de croisière dont un est visible sur l’image.
Dans cette structure annulaire dominée par un chicot basaltique, la route littorale dessert l’ensemble de l’île et organise l’urbanisation, concentrée sur le littoral en raison de très fortes pentes. Toutefois, quelques voies partent à l’assaut de celles-ci et permettent un épaississement de la bande urbanisée.
Les séries de villas sur pilotis de l’est de l’île
L’est de l’île se caractérise par la mise en valeur des îlots jusqu’ici inhabités de la couronne récifale par les plus grandes chaînes hôtelières mondiales (Marriott, Accor, Hilton, Intercontinental…).
Comme le montre l’image, sept jetées de villas sur pilotis se déploient dans le lagon et accueillent des centaines d’unités. Elles sont un des principaux géosymboles d’un tourisme de luxe qui intègre toujours plus étroitement ces îles à la mondialisation touristique contemporaine.
Image complémentaire
Bora Bora et sa voisine au Sud-Est Raiatea
[Accéder à la traduction de ce dossier en espagnol ]
Blondy C., 2016, « Le tourisme, un facteur de développement durable des territoires insulaires tropicaux ? Tourisme, aménagement, environnement et société locale à Bora Bora (Polynésie française) », Mondes du Tourisme, [En ligne], Hors-série | 2016, mis en ligne le 1.9.2016, consulté le 16.9.2018. URL : http://journals.openedition.org/tourisme/1283 ; DOI : 10.4000/tourisme.1283
Dupon J.-F. (dir.), 1993, Atlas de la Polynésie française, Paris, ORSTOM.
Gay J.-Ch., 2009, Les Cocotiers de la France. Tourismes en outre-mer, Paris, Belin
Contributeur
Jean-Christophe Gay, professeur des universités, IAE de Nice, université Nice Sophia Antipolis