Publié le 03 juillet 2024

Etude clinique BRACE : au lit pendant 60 jours pour la science

  • Vols habités

Un volontaire de l'étude BRACE dans la centrifugeuse à la clinique spatiale de MEDES, à Toulouse, utilisée pour reproduire une gravité artificielle
Centrifugeuse à la clinique spatiale de MEDES, à Toulouse, utilisée pour produire une gravité artificielle © MEDES

Publié le 6 mai 2024

La 2e phase de l’étude BRACE destinée à préserver la santé des astronautes lors des futurs vols spatiaux de longue durée vient de se terminer à Toulouse, l’occasion de faire le point avec notre experte en sciences de la vie : Guillemette Gauquelin-Koch.

-6°, la tête en bas

Clap de fin pour l’étude du CNES et de l’ESA d’alitement prolongé BRACE (Bed Rest with Artificial gravity and Cycling Exercise) réalisée à Toulouse dans la clinique spatiale de MEDES. L’expérience s’est terminée le 4 mai 2024 pour les 12 nouveaux volontaires. Ils ont ainsi passé 88 jours à la clinique, dont 60 jours allongés 24h/24 sur des lits inclinés à -6°, la tête en bas (une façon de recréer les conditions de micropesanteur dans lesquelles se trouvent les astronautes dans l’espace). Objectif ? Etudier l’impact de l’exercice physique (ici le vélo) et de la gravité artificielle (grâce à une centrifugeuse) pour contrer les effets néfastes de la micropesanteur sur le corps humain.

Image d'un volontaire de l'étude BRACE en train de réaliser une séance de vélo allongé sur un lit incliné à -6° la tête en bas
L'étude BRACE a permis de tester l'exercice physique (ici le vélo) pour contrecarrer les effets néfastes de la micropesanteur sur le corps humain. © CNES/R. Gaboriaud, 2024

Le but est ainsi de déterminer si la gravité artificielle apporte un bénéfice par rapport à l’exercice réalisé seul. Les 12 volontaires ont été répartis en 3 groupes : 4 d’entre eux ont fait partie du groupe « centrifugeuse et exercice », 4 d’entre eux on intégré le groupe « exercice seul » et les 4 autres ont constitué le groupe « contrôle », sans aucune méthode de prévention. De nombreuses mesures et tests médicaux ont ainsi été menés auprès des participants par les 14 équipes scientifiques qui participent à l’étude : systèmes musculaires, osseux, cardiovasculaires, immunitaires… Tous ont été passés au crible.

Parmi les protocoles menés, on peut par exemple citer celui d’une équipe de recherche à l’Institut Pluridisciplinaire Hubert Curien (CNRS UMR7178) à Strasbourg qui étudie la balance énergétique, c’est à dire la différence entre les dépenses et les apports énergétiques du corps humain.

Une priorité pour les vols spatiaux de longue durée

L'équipe de recherche a obtenu des données originales qui apportent des 1eres pistes. Il a été noté pendant d’autres études d’alitement prolongé, que le volume d'exercice prescrit est directement associé à la perte de masse corporelle et de masse grasse. Plus récemment, on a observé chez des astronautes une grande variabilité interindividuelle dans l'évolution de la masse corporelle et de la masse grasse après 6 mois passés à bord de la Station spatiale internationale. Cette variabilité inter-astronautes était associée au temps passé à faire de l'exercice et à être physiquement actif, ce qui avait un impact sur les 2 pendants de la balance énergétique : les dépenses et les apports

Guillemette Gauquelin-Koch, responsable de la thématique Sciences de la vie au CNES

Portrait de Guillemette Gauquelin

Un déficit énergétique chronique peut exacerber les réponses physiologiques déjà induites par la micropesanteur. Ceci est particulièrement vrai pour l'atrophie musculaire, le déconditionnement cardiovasculaire ou la détérioration de l'humeur et du bien-être.

« Dans notre exemple, en comparant les résultats obtenus chez les volontaires du groupe "contrôle" à ceux des volontaires soumis à un protocole d’exercice (sur vélo) ou à de l’exercice couplé à de la gravité artificielle (centrifugeuse), nous allons évaluer l’impact de l’exercice physique combiné ou non à de la gravité artificielle sur la régulation de la balance énergétique, pour mieux pouvoir la contrôler », explique Guillemette Gauquelin-Koch. « Cette comparaison sera faite dans le cadre de tous les protocoles menés durant l’étude. Pour les vols de très longue durée, comme ceux envisagés pour aller vers Mars, il est essentiel de contrecarrer les effets négatifs de la micropesanteur sur l’organisme avec des méthodes les plus efficaces possibles. La gravité artificielle, créée par centrifugation, est prometteuse. Elle agit sur tous les organes en même temps. »

Les données recueillies dans le cadre de l’étude BRACE vont maintenant être analysées par les équipes scientifiques à travers toute l’Europe. BRACE apportera des informations nouvelles et pertinentes pour mieux préparer les futurs vols spatiaux et ainsi assurer la santé et les performances des astronautes avec à la clé, le succès d'une mission. Dans le même temps, les données recueillies seront utiles sur Terre, ces études étant un excellent modèle d’hyper-sédentarité.

BRACE en bref

  • Une étude du CNES et de l'ESA menée par MEDES (Institut de Médecine et de Physiologie Spatiales) dans son infrastructure de recherche clinique, la clinique spatiale, à Toulouse
  • Une étude de simulation de l’impesanteur au sol utilisant le modèle d’alitement
  • L'évaluation de 2 contre-mesures (méthode de prévention) destinées à limiter les effets néfastes de l'impesanteur sur le corps humain : la gravité artificielle associée à du vélo et du vélo seul
  • 2 campagnes de 3 mois chacune (la 1ere a eu lieu au printemps 2023)
  • 88 jours d’étude dont 60 jours d’alitement
  • 12 volontaires sur chaque campagne (24 au total des 2 campagnes)
  • 14 équipes scientifiques recrutées par l’ESA et le CNES pour mener des protocoles sur les différents systèmes physiologiques

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