Publié le 7 juin 2024
Près d'un mois après le lancement réussi depuis la Chine, et a près plusieurs jours d'opérations et une semaine intense de préparations, l'équipe française de DORN était au rendez-vous, à la fois en Chine et en France*, pour suivre l'alunissage de la sonde chinoise Chang'e 6 sur laquelle était embarqué l'instrument français. Toutes les équipes de l'IRAP et du CNES impliquées ont ainsi retenu leur souffle pendant les 15 minutes de procédure automatique de descente et d'atterrissage sur notre satellite naturel.
*Les représentants français sur place suivaient les opérations depuis la NAOC (National Astronomical Observatory Center) à Pékin, en communication constante avec l'équipe chinoise basée à la BACC (Beijing Aerospace Command Center - centre de commandes).
7 heures et quelques minutes après la confirmation de l'alunissage, le dimanche 2 juin à 07h30 (heure de Paris), DORN a été rallumé avec succès. Après quelques ajustements, son bon fonctionnement a été confirmé par un premier jeu de mesures attendues avec une grande impatience par l'équipe scientifique. Premier instrument français actif à la surface de la Lune, il a pu fonctionner durant 23 heures à la surface de notre satellite naturel.
« Les opérations, avec et parmi nos collègues chinois, se sont bien déroulées et DORN a bien fonctionné ! » se réjouit Pierre-Yves Meslin, responsable scientifique de DORN à l'IRAP.
« Notre mission en Chine s'achève donc et nous serons de retour en France avant les échantillons de Chang'e 6 sur Terre. Il reste maintenant à souhaiter bonne chance aux ingénieurs chinois pour les manœuvres de rendez-vous en orbite qet le transfert des précieux échantillons du sol lunaire dans la capsule de retour. »
DORN n'en était pas à son premier allumage
Le 5 mai, deux jours après avoir quitté la Terre DORN était allumé pour la première fois durant 10 heures lors de la phase de croisière entre la Terre et la Lune. L'instrument se portait alors très bien. Le 8 mai, la sonde Chang'e 6 a réussi sa mise en orbite autour de la Lune. Alors que l'allumage suivant de l'instrument français était prévu au 19 mai, le Soleil est venu impacter le planning :
« En raison de la très forte activité solaire à ce moment-là, nous avons fait appel à nos collègues de l'IRAP spécialistes du vent solaire, qui nous tenaient informés de l'évolution de l'activité solaire quasiment en temps réel. Grâce à leurs informations, nous avons décidé de décaler notre allumage au 17 mai, et ce pour une durée de 3 jours, soit plus qu'initialement espéré. DORN a de nouveau été allumé les 23 et 24 mai, en orbite circulaire autour de la Lune. »
Pierre-Yves Meslin, responsable scientifique de l'instrument DORN à l'IRAP.
Que faisait DORN sur la face cachée de la Lune ?
DORN avait pour objectif d'étudier l'origine et la dynamique de l'atmosphère de la Lune ainsi que les propriétés thermiques et physiques de son sol. Pour cela, il a mesuré le radon et le polonium, deux traceurs radioactifs présents à la surface lunaire.
Plus précisément, il devait étudier le dégazage lunaire et le transport des gaz depuis le régolithe (la poussière qui recouvre le sol de notre satellite naturel) jusque dans l'exosphère lunaire. Le radon étant un gaz radioactif produit de façon continue dans le sol lunaire par la désintégration de l’uranium, son étude et l'observation de son comportement doivent permettre d'en déduire la teneur en uranium dans le sol de la Lune.
Chang'e 6 : récupérer des échantillo ns de la face cachée de la Lune
La mission principale de Chang'e 6, la sonde sur laquelle était embarquée DORN, est de récolter pour la première fois des échantillons potentiellement issus du manteau de la face cachée de la Lune, mais aussi des éjectas des plateaux lunaires (matériel de la croûte) et des basaltes issus du volcanisme qui a eu lieu sur cette face cachée il y a 2,4 à 3,4 milliards d'années. Ceci devrait permettre de mieux connaître la composition globale de la Lune, de mieux comprendre la dichotomie entre sa face visible et sa face cachée, et d'améliorer la méthode de datation des surfaces planétaires.
La première grande étape de la mission scientifique se jouait dans les 48 heures qui ont suivi l'alunissage : au-délà de l'activité de DORN, des prélèvements ont été effectués dans le but d'obtenir environ 2 kg de régolithe, la matière qui compose le sol lunaire. DORN a été éteint alors que la partie supérieure de Chang'e 6, porteuse des échantillons, redécollait pour rejoindre l'autre section du vaisseau restée en orbite. La précieuse récolte sera bientôt placée dans une capsule hermétique et ramenée vers notre planète. Le retour sur Terre des échantillons est prévu aux alentours du 25 juin.
Les échantillons ainsi récoltés par Chang'e 6 seront alors analysés en laboratoire. Ces analyses pourront notamment être comparées à ce que DORN aura mesuré directement dans l'environnement lunaire.
Après un demi-siècle, DORN a marqué le retour de la France à la surface de la Lune, cinq décennies après les missions soviétiques Lunakhod 1 et 2 qui emportaient des instruments français passifs en 1970 et 1973.
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