Croatie - Split, une perle de la Côte dalmate en profondes mutations

Très ancienne cité de la côte dalmate sur la Mer adriatique, Split est aujourd’hui une importante ville portuaire, industrielle et touristique en pleine mutation. La stabilisation géopolitique de l’ex-Yougoslavie, l’adhésion de la Croatie à l’Union européenne et le renouveau du tourisme, en particulier des croisières, s’y traduisent par une revalorisation de ses traditions maritimes et littorales.

 

Légende de l’image

Cette image de la ville de Split, située sur la côte dalmate en Croatie, a été prise par un satellite Sentinel 2 le 30 septembre 2018. Il s’agit d’une image en couleurs naturelles, de résolution de 10m

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Présentation de l'image

Site et situation : un double privilège de port profond au fond d’un golfe

La ville de Split est en position de carrefour et d’interface, au centre de la Croatie, entre terre et mer. Elle appartient à la guirlande des villes littorales qui bordent l’Adriatique et la côte dalmate le long du littoral de la république croate (Rijeka, Zadar, Dubrovnik). Bordée par les contreforts de la chaine des Alpes dinariques qui s’étagent à une cinquantaine de km du trait de côte et dont l’altitude dépasse rapidement les 1 000 mètres, Split et sa région se sont développées autour des îles (Brac, Hvar, Korcula, Vis…) et des étroites plaines côtières de la côte dalmate. (croquis n°1 et n°2 en pdf)

Acéder au croquis présentant le comté de Split (croquis 1) et celui présentant le site Split légendé (croquis 2)

Comme le montre l’image, dans cet espace côtier très découpé, la ville dispose d’un triple privilège. Le site de la ville se situe au fond d’un étroit golfe marin dont l’entrée est relativement étroite, dont assez facilement défendable. Ce port en eaux profondes permet d’accueillir des navires de grandes tailles et de développer d’importantes activités navales. La ville de Split fête d’ailleurs ses 1700 ans d’existence en 1995.

En bordure de l’Adriatique, le comté de Split s’étend sur 4 540 km². Il compte 454 798 habitants en 2018, soit 10 % de la population croate. Si la vile de Split occupe une place prépondérante avec 180 000 habitants, s’y rattachent aussi des iles de la côte dalmate de Brač, Hvar, Šolta et Drvenik.  Celles-ci sont reliées à Split par un réseau de ferries très efficace qui font de Split le plus grand port de ferries croate avec 5,3 millions de passagers et 800 000 véhicules en 2018.

Cet ensemble est connecté à la capitale Zagreb par l’autoroute A 1 qui - contrairement à l’étroite route nationale côtière - traverse les massifs montagneux qui séparent la Croatie de la Bosnie-Herzégovine, qui n’est qu’à 70 km de Split. Celle-ci est doublée d’une ligne ferroviaire, en cours de rénovation, qui permet d’atteindre aussi bien Zagreb au nord-est  (260 km) que Dubrovnik au sud  (166 km).  Une ligne LGV «Adriatic-Ionian Rail» est inscrite dans le projet INTERREG  prévu en 2031 afin de raccorder la Grèce à l'italie via l'Albanie, le Monténégro  et la Croatie. Bien visible sur l'image, la ville dispose également, à 30 km du centre-ville, du deuxième aéroport international du pays qui a accueilli plus de 3 millions de passagers en 2018, attirés par son potentiel touristique mais aussi par la diversité de ses activités économiques.

Accéder au croquis présentant la ville de Split, interface et carrefour régional (croquis n°3)

Split : une ville historique au riche patrimoine tournée vers la mer

L’originalité de Split est que la ville est née d’un caprice de l’empereur romain Dioclétien, [245-313]. Profitant du partage du pouvoir qu’il instaura par la tétrarchie, il prit sa retraite en 305 dans sa région natale, la Dalmatie, en se faisant construire à Split un énorme palais pour y finir ses jours.

Les invasions « barbares » qui déferlèrent sur la région dès le IVème, firent du palais abandonné un refuge pour les populations locales qui finirent par s’y établir définitivement. Morcelé, découpé, le palais est ainsi devenu une petite ville cernée de remparts et même le siège d’un archevêché, quand le mausolée de Dioclétien fut transformé en cathédrale. C’est une énorme surprise pour le visiteur que de découvrir au fur et à mesure de sa promenade dans la ville, les vestiges de ce palais impérial, parfois difficiles à discerner au cœur d’un quartier populeux, très peuplé, ponctué de marchés où les ruines antiques sont associées aux souvenirs des occupations vénitiennes (XVème-XVIIIème) et françaises. (Napoléon) alors que la ville romaine de Salona (Solin) qui jouxte Split, abandonnée dès le IVème car trop exposée aux raids ennemis, est un ensemble de ruines romaines comme on a coutume de les voir.

Split et Trogir ont été inscrites par l'Unesco au patrimoine mondial de l’humanité, ce qui a renforcé la protection de leur remarquable patrimoine architectural. Les touristes abondent dans la région, ce qui explique l’importante infrastructure hôtelière et la vitalité des commerces qui représentent ensemble 45 % des activités de la ville.

Accéder au croquis présentant la ville de Split, centre touristique (Croquis 4)

Split : un centre économique de grande importance

Si depuis l’entrée de la Croatie dans l’économie de marché, l’industrie de Split a connu un recul après avoir été un centre important pendant la période communiste dans le cadre de la Yougolavie, ce secteur productif représente encore avec le BTP et le transport, 35 % des activités de la région. La construction navale est une des activités industrielles de la ville (16, 4 %), où se sont développées à côté des productions agroalimentaires (pêche, olives, vin ; 28, 3%), une industrie d’extraction et des cimenteries en zone karstique (13 %), des activités de constructions mécaniques (10, 6%) ou métallurgiques (7,8%). Comme le montre l’image, ces activités forment une ceinture industrielle à une vingtaine de kilomètres du centre-ville, davantage voué comme nous l’avons vu au tourisme.

Avec six facultés enseignant les sciences de l’ingénieur, le droit, l’économie, la chimie, la construction navale ou encore l’architecture, Split attire de la main d’œuvre de toute la Croatie grâce à la manne touristique mais aussi aux perspectives de développement de la ville. Elle dispose d’une main d’oeuvre relativement qualifiée puisque 14 % de la population a un niveau d’études supérieures. Pour autant, la ville connaît un taux de chômage important (24 %), supérieur à la moyenne nationale (17 %), lié à l’impossibilité pour les générations ayant travaillé dans l’industrie à l’époque communiste de se reconvertir dans les services.  

Split attire chaque année des milliers de touristes. Depuis une décennie, c’est une escale prisée des croisiéristes grâce à son port en eau profonde où ont abordé en 2018, 265 bateaux de croisière géants transportant plus de 350 000 passagers. L’engouement est tel qu’une nouvelle jetée pour accueillir et mieux répartir leurs quelques 3 000 passagers débarquant en même temps est en construction. Dotée de 27 ports de plaisance et de 13 marinas, la ville est tournée vers la mer car elle dispose aussi d’un port de commerce qui, bien que modeste à l’échelle monde (3 millions de tonnes), n’en joue pas moins un rôle important à l’échelle régionale.

Split : en perpétuel développement

L’entrée de la Croatie dans l’Union européenne en 2013 a été vue comme une chance car elle dispose ainsi des fonds européens (FEDER) soit plus d’un milliard d’euros par an, pour développer et créer des entreprises. En outre, l’état croate offre d’autres aides financières aux entrepreneurs qui ouvrent cinq nouveaux établissements et investissent 150 000 euros ainsi qu’aux micro-entrepreneurs qui s’engagent pour 50 000 euros et 3 établissements dans les secteurs manufacturiers, de la recherche et de l’innovation, le tourisme et d’hôtellerie, secteurs prioritaires des politiques publiques de développement local et régional.

Il s’avère que les atouts de Split coïncident parfaitement avec les plans de développement nationaux de la Croatie. Ainsi, quatre projets sont en ce moment soutenus par l’Etat et la région de Dalmatie. L’aménagement d’un front de mer paysager et balnéaire (villas, appartements, hôtels) à Racetinovac, à 2 km de Trogir. Un écovillage à Stonska sur l’ile de Brač à 200 mètres de la mer. Une usine de production de pâtisseries fraiches et surgelées à 80 km de Split et un projet de relance d’extraction de marbre et matériaux de haute qualité, utilisés depuis l’époque romaine à Trogir dans la carrière Skalice. Autant de projets qui cherchent des investisseurs car les capitaux manquent encore en Croatie qui ne pourra obtenir l’Euro qu’en 2024 si elle remplit les conditions exigées. Une mesure à la fois redoutée et espérée tant son impact sur le tourisme et l’ensemble de l’économie serait considérable.

Pour autant, ces potentialités se heurtent à une coopération transfrontalière encore réduite du fait d’un voisinage géopolitique parfois conflictuel et des frontières fermées avec les Etats de Bosnie-Herzégovine, Serbie et du Monténégro, issus comme la Croatie de l’éclatement de l’ex-Yougoslavie. La région fait aussi face à des liaisons insuffisantes avec l’Italie et la Slovénie, d’où les espoirs dans la ligne LGV qui devraient se concrétiser dans la prochaine décennie.


 

Source des données

Marin Kovačević : accéder au site

Image complémentaire

 

La ville de Split dans son cadre régional.
Cette image satellite a été réalisée le 30 septembre par le satellite Sentinel 2A.

 

 

Contributeur

Françoise Dieterich, Professeure en CGE, Lycée Montaigne, Mulhouse