Chine - L’archipel des Paracels : construire des îles pour projeter sa puissance et contrôler la Mer de Chine méridionale

En Mer de Chine méridionale, l’archipel des Paracels est sous contrôle de la Chine populaire. Elle s’en est emparée en 1974 au détriment du Viêt-Nam, qui en réclame toujours depuis la souveraineté, tout comme Taïwan. Ce conflit – qui est à la fois territorial, car insulaire, et frontalier, car maritime - témoigne que pour Pékin la maritimisation du pays passe par la maîtrise, la possession et l’appropriation des mers bordières. Cette projection suppose pour être efficace de disposer de points d’appuis terrestres de qualité, tels l’archipel des Paracels. Quitte à y construire à partir de récifs et d’atolls de véritables îles. Les bases qui y sont installées rappellent qu’il ne peut y avoir projection de puissance sur les mers et les océans sans forces navales d’un côté et sans bases et points d’appui terrestres pour les accueillir de manière permanente de l’autre.

 

Légende de l’image

 

Situé en mer de Chine, l'image de l'archipel des Paracels a été réalisée par le satelitte Sentinel-2A le 18 juin 2020. Cette image en couleurs naturelles a une résolution native à 10m.


Contient des informations © COPERNICUS SENTINEL 2020, tous droits réservés

 


Repères géographiques

 

 

 

Présentation de l’image globale

Les Paracels : un archipel au rôle géostratégique pour la projection de la puissance chinoise en Mer de Chine méridionale

Les Paracels : un archipel tropical émietté au raz des eaux

Cette image satellite couvre l’essentiel de l’archipel des Paracels, également appelé Xishâ par les Chinois et Hoang Sa par les Vietnamiens. Comme le montre bien l’image, il se caractérise par trois éléments majeurs.

Il s’étend entre le 15°45’ et le 17°05 de latitude Nord et entre le 111° et le 113° de longitude Est en Mer de Chine méridionale. Nous sommes donc en zone tropicale, à peu près à la même latitude qu’Hawaï. Se déployant sur une zone de hauts fonds, l’archipel est constitué d’îles coralliennes et de lagons de taille, de forme et de qualité différentes. Les récifs coralliens, plus ou moins submergés, entourent des lagons plus ou moins profonds comme l’indiquent les variations de couleurs qui vont de l’indigo foncé, lorsque la profondeur est importante, aux pastels du bleu et du vert ailleurs. Ces récifs sont parfois traversés par des passes, plus ou moins profondes, qui relient le lagon intérieur à la mer.

Au plan climatique, l’archipel reçoit en moyenne 1,3 m. de précipitations par an sur environ 100 jours, disposant ainsi d’environ 2.800 jours d’ensoleillement alors que la température moyenne est de 27°C. Pour autant, il se situe sur le passage de typhons relativement fréquents ; ce qui n’est pas sans poser donc d’importants défis à l’installation sur ces îles d’une présence humaine permanente.

Ce archipel est isolé en haute mer puisque l’île chinoise d’Hainan, province à laquelle il est rattaché administrativement, se trouve à environ 250 km au nord-ouest et les côtes du Viêt-Nam à environ 300 km à l’ouest. Il faut ainsi environ entre 10 et 15 heures de navigation pour l’atteindre en partant de l’île chinoise d’Hainan. Durant la période contemporaine, ces îles - sans ressources propres où même l’eau potable - est rare furent d’ailleurs inhabitées par une population permanente jusqu’en 2013.  

Par contre, la notion d’isolement est toujours relative et dépend des emboîtements d’échelles utilisés pour étudier une localisation à la surface du globe. A l’échelle de l’ensemble de la Mer de Chine méridionale, les Paracels sont dans le voisinage immédiat de l’île d’Hainan. Elles constituent surtout un relais géostratégique majeur pour se projeter encore plus loin vers le Sud, c’est-à-dire vers l’archipel des Spratley qui se trouve à environ 550 km au sud-est des Paracels, pour ses îles les plus proches.   

Enfin, comme en témoigne bien l’image, l’archipel des Paracels est géographiquement très étendu et ses îles bien dispersées. Il se déploie sur l’image sur 130 km du nord au sud et sur 160 km d’ouest en est.  S’il est doté d’une trentaine d’îles et d’îlots qui couvent environ 21 000 km² d’espace maritime, les surfaces émergées ne représentent que 7,75 km². Les terres émergées disponibles y sont donc très rares, très émiettées et minuscules. Ce qui constitue comme nous le verrons un vrai handicap qu’il faut donc combler par d’importants travaux de construction et d’aménagement. De même, le point culminant se trouve à seulement + 14 m. d’altitude au dessus des eaux sur l’île principale de Woody Island (cf. zoom 1), ce qui est très faible.

 

Un ensemble d’îles d’un intérêt très inégal pour une occupation permanente

Cette trentaine d’îles et d’îlots est d’une grande variété de par leur nature, leur qualité et leur taille : atolls et îles coralliennes, rochers, îles sableuses ou çayes… On distingue au nord l’Amphitrite Group composé d’îles basses et de lagons entourés de récifs coralliens, auquel appartient la fameuse Woody Island. A l’ouest, le Crescent Group - à 80 km environ de l’Amphitrite Group – est constitué de plusieurs îles minuscules (Drummond, Duncan and Palm, Robert, Pattle Islands), de hauts fonds (Observation Bank) et de récifs coralliens (Antelope Reef).  

Ces structures présentent donc un intérêt très inégal pour une occupation humaine permanente. On trouve d’abord de nombreux hauts fonds couverts par les eaux (Bremen Bank à – 11 m de profondeur, Neptuna Bank à – 15 m…) qui y gênent et y contraignent la circulation maritime. De même, un grand nombre de récifs coralliens et d’atolls sont eux aussi submergés comme Discovery Reff - de forme ovale, orienté ouest/est et doté de deux passes profondes, ou encore North Reef, Vuladdore Reef ou Bombay Reff.  

Au total, les îles émergées sont peu nombreuses et minuscules, comme Passu Keah située au sud de l’image, qui est une petite île de sable entourée d’un récif, Pattle Island (31 ha), Robert Island, Duncan Island (48 ha) ou Drummond Island (21 ha) dans le Crescent Group occidental. Cette rareté des espaces émergés et leur fragilité structurelle expliquent l’importance de deux ou trois îles ou îlots  comme Woody Island ou Duncan Island qui vont polariser tous les efforts (cf. zoom 1 sur Woody Island et zoom 2).

En effet, ces espaces sont si rares qu’ils sont survalorisés par une série de travaux gigantesques au prix de véritables prouesses logistiques et techniques et d’énormes investissements financiers que seule en définitive la Chine était ces dernières décennies en capacité de mener à bien comme Etat riverain.

 

 

Carte de localisation des archipels des Paracels et des Spratly en Mer de Chine méridionale.
Source : fond de carte tiré de CRS Report – R42784, sept. 2019, en accès direct, libre et gratuit.

 

Bétonner et artificialiser pour fabriquer du territoire et produire de la souveraineté

Car, afin de bien marquer son emprise territoriale sur l’ensemble de l’archipel dans le cadre d’une stratégie du fait accompli, Pékin multiplie dès que cela est possible les installations techniques : on creuse un passage navigable dans la barrière du récif, on aménage une darse et un ponton ou une digue, on installe des bâtiments et une piste d’hélicoptère.

Ce modèle de prise de possession technique, et donc militaire puisque réalisée par l’armée et géopolitique, se généralise partout où cela est possible (West Sand, Pattle Island, Duncan Island, Lincoln Island à l’est hors image…). Ce processus de construction et d’artificialisation des îles répond à une triple fonction.

D’abord, produire du territoire : la bétonisation des récifs et hauts-fonds d’un côté, l’installation à demeure d’une population permanente sur Woody Island de l’autre permettent à Pékin - et c’est très important en droit maritime - de requalifier juridiquement ces zones en « îles ».

Ensuite, deuxièmement, marquer et s’approprier du territoire à la fois terrestre, mais il est insignifiant comme nous l’avons vu par la taille des îles, et surtout maritime puisque le statut d’île permet d’y associer une ZEE potentielle de 200 milles nautiques, soit environ 370 km.

Enfin, troisièmement, valider de facto cette appropriation permet à Pékin de se doter de bases nécessaires à la projection de sa puissance militaire.    

Une région insulaire et archipélagique rattachée à la province d’Hainan

Depuis janvier 1974, date à laquelle la Chine s’est emparée militairement des îles Paracels en profitant de l’effondrement du régime sud-vietnamien, Pékin contrôle l’ensemble de cet archipel malgré les revendications du Viêt-Nam et de Taïwan sur celui-ci. C’est donc une configuration géopolitique et géostratégique très différente de celle de l’archipel des Spratley, puisque plusieurs Etats s’y sont installés en prenant des gages territoriaux afin d’appuyer leurs revendications territoriales respectives. Dans les Spratley, la Chine n’y contrôle ainsi que sept « îlots » : Cuarteron Reef, Fiery Cross Reef, Gaven Reef, Hughes Reef, Johnson Reef, Subi Reff depuis 1988 et, enfin, Mischif Reff depuis 1995.   

L’affirmation de la souveraineté chinoise sur les Paracels s’est appuyée sur une profonde refonte des structures administratives - provinciales et municipales - dans la région. L’objectif est clair : banaliser le statut politique et administratif de ces entités, même si les Paracels demeurent une fiction, tant elles sont sous totale perfusion car non viables économiquement et socialement, afin de les intégrer dans un continuum entre système insulaire et immense Chine continentale.    

Premièrement, l’île d’Hainan a été détachée de la province du Guangdong en 1988 pour être élevée au rang de nouvelle province, avec la ville Haikou comme capitale régionale. Cet espace provincial insulaire a ensuite été complément dilaté par le rattachement administratif des archipels méridionaux des Paracels et des Spratley - et leurs espaces maritimes – à la province d’Hainan.

Deuxièmement, en juillet 2012, Pékin créé la ville-préfecture de Sansha. Sansha a la particularité d’être installée sur Yongxing – Woody Land, la plus grande île  des Paracels (cf. zoom 1). Dépendant directement du gouvernement provincial d’Hainan, cette minuscule ville-préfecture insulaire se voit attribuer la responsabilité administrative des quelques 280 îles et récifs des Paracels et des Spratleys. En mai 2020, Pékin continue sont processus d’ingénierie administrative et géopolitique en annonçant la création de deux nouveaux districts : le Xisha – Paracel District et le Nansha - Spratly District.

Cette « provincialisation » puis cette « municipalisation » ont pour double objectif à la fois une territorialisation de plus en plus symbolique et affirmée de la présence de la Chine populaire dans cet espace maritime disputé d’un côté, une banalisation de cette intégration au territoire national de l’autre. En retour, il convient de souligner que le gouvernement vietnamien maintient ses revendications et suit la même logique en intégrant formellement ces îles à l’aire administrée par la ville de Da Nang.

Les Paracels : la construction d’une « forteresse navale »  

Au total, la Chine transforme l’archipel des Paracels en laboratoire militaro-stratégique. Cette véritable « forteresse navale » tient le rôle de poste avancé grâce à ses puissantes installations militaires défensives et offensives dans un passage maritime stratégique. L’espace occupé par la piste aérienne sur Woody Island est à cet égard emblématique de l’hypertrophie de sa fonction géostratégique. La mer de Chine méridionale est en effet redéfinie en 2009 comme une « zone d’intérêt vitale » et devient un des espaces maritimes dans lequel le concept chinois de « défense active des mers proches » prend tout son sens.

Depuis 2015, le potentiel militaire n’a cessé de s’y renforcer tout en changeant d’échelle. Ces îles accueillent en effet des installations de systèmes d’écoute, d’interception et d’espionnage, de bases radar, de centres de brouillage et d’armements défensifs anti-navires et anti-aériens (bases de lancement de missiles sol-mer et sol-air). En 2018, Woody Island sert de base d’où peuvent rayonner des bombardiers stratégiques H6K, à capacités nucléaires. Enfin, la Chine a déployé entre l’île d’Hainan et l’archipel des Paracels un réseau de télécommunications, de senseurs et d’écoutes sous-marines entre 2016 et 2020 fournissant des informations en temps réel. Ce « Blue Ocean Information Network » est dual car il présente une double fonction, à la fois civile (météo, recherche scientifique…) et militaire (identification en particulier par signature acoustique des navires de surfaces et sous-marins, en particulier étasuniens).  

Ces installations permettent à la Chine de constituer ce que les stratèges appellent une bulle d’interdiction et de déni d’accès – soit A2, pour Anti-access, et AD, pour Access-Denial en anglais. L’objectif est de faire de la mer de Chine une zone-tampon protégeant son territoire continental et tout autant un levier de projection vers le Sud et l’océan Pacifique. Dans ce processus, les bases navales de Yulin et de Yalong situées dans le sud de l’île d’Hainan jouent un rôle déterminant en abritant une importante flotte de combat, mais surtout la grande base de SNLE – sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (missiles balistiques à têtes nucléaires de la force de dissuasion)

La mer de Chine méridionale : un des grands points chauds géopolitique de la planète

En quelques décennies, on a donc assisté en mer de Chine méridionale à une véritable course à la mer entre Etats riverains. Ce processus a débouché sur de fortes tensions et de nombreux conflits frontaliers, terrestres pour le contrôle des îles et maritimes pour le contrôle des eaux (ZEE) qui présentent d’importantes ressources avérées (pêche) ou potentielles (hydrocarbures). Ainsi, en mai 2014, une importante crise éclate entre Pékin et Hanoï à la suite d’une décision unilatérale du géant chinois CNOOC d’implanter la plateforme de forage pétrolier Haiyang Shiyou 981 au sud de l’archipel des Paracels dans une zone maritime que le Viêt-Nam revendique comme appartenant à ses eaux territoriales, contraignant la Chine à reculer. Enfin, de par sa position entre l’Asie du Sud-Est et l’Asie de l’Est, la mer de Chine méridionale est traversée par les plus importantes routes maritimes au monde sur lesquelles circulent environ un tiers du commerce mondial.

Dans ce contexte, la Chine populaire revendique une zone de souveraineté sur plus de 80 % des 2,5 millions de km2 de cet espace maritime, délimitée par une ligne en dix traits incluant Taïwan. Mais cette ligne chinoise recoupe les ZEE des sept autres pays riverains : Philippines, Indonésie, Viêt-Nam, Brunei, Malaisie, Singapour et Taïwan. Les conflits, tensions ou frictions sont particulièrement vifs avec le Viêt-Nam, Taiwan, les Philippines, la Malaisie et l’Indonésie. Pour autant, le Tribunal arbitral de La Haye, saisi par les Philippines, juge en 2016 que la Chine n’a pas de base légale pour revendiquer des « droits historiques » sur la zone et rejette donc sur le fond toutes les revendications de Pékin en mer de Chine méridionale.

 Mais à l’échelle mondiale, la mer de Chine méridionale est aussi un des espaces maritimes où la rivalité entre la Chine et les Etats-Unis est la plus frontale comme en témoignent de nombreux incidents, accrochages ou opérations d’intimidation entre les deux marines. Alors que Washington renforce son engagement aux côtés des pays d’Asie du Sud-Est, l’US Navy multiplie les « Opération pour la liberté de navigation »  (« US Freedom of Navigation », ou FON) dans l’espace maritime revendiqué par Pékin. A titre d’avertissement, en août 2020, la Chine tire à partir des provinces du Qinghai et du Zhejiang quatre missiles balistiques conventionnels d’une portée comprise entre 1.800 et 4.000 km vers la mer de Chine méridionale, qui atterrissent dans l’espace maritime compris entre l’île d’Hainan et l’archipel des Paracels dans un périmètre interdit à la navigation dans le cadre de grandes manœuvres militaires.  

 

Zooms d’étude

 

Zoom 1 - Yongxing - Woody Island,
la « perle » des Paracels

Une île totalement bouleversée et réaménagée sous complète perfusion

Au nord de l’archipel, dans l’Amphitrite Group - du nom de la frégate française Amphitrite qui le visita en 1698 - l’île de Yongxing – ou Woody Island – est la « perle» des Paracels.

Et ce pour deux raisons majeures. Premièrement, c’est l’îlot le plus solide et le plus élevé en altitude de l’archipel : l’Ile actuelle couverte par l’image résulte de la fusion matérielle en 2016 de Woody Island proprement dite avec la minuscule Rocky Island, qui est le point culminant de l’archipel (14 m). Deuxièmement, si cette île est minuscule  - 210 hectares, soit 2,6 km² – c’est la plus grande de toutes les îles de l’archipel.  

Comme le montre l’image, elle a donc fait l’objet d’une transformation radicale grâce à des travaux de construction et d’aménagement exceptionnels. Sa forme ronde initiale disparaît vers l’ouest avec l’excroissance des deux ports artificiels en eau profonde creusés dans la structure récifale et protégés par de puissants môles ou digues. Vers l’est, la construction dans les années 1990 d’un aéroport doté d’une piste de 2700 m de long capable d’accueillir des avions civils et, surtout, militaires mord largement à chaque extrémité sur le platier récifal ou sur la mer. Enfin, au nord-est, l’ex-rocher de Rocky Island est aujourd’hui totalement rattaché à l’île principale avec la construction d’une digue et le comblement de tout l’espace intermédiaire. Au niveau terminologique, l’usage du terme de polderisation - terrains gagnés sur la mer, mais situés sous le niveau marin de base, comme aux Pays-Bas - utilisé par certains auteurs est donc inexact ; nous sommes bien face à des opérations de remblaiement ; ce qui est préférable face aux cyclones.  

Enfin, toute la partie centrale a été urbanisée et réaménagée afin d’accueillir la population et les fonctions résidentielles d’un côté, les activités miliaires de l’autre. L’île compte en effet officiellement 1400 habitants, soit une densité de 555 hab./km². Elle est dotée des équipements, des fonctions et des services de base valorisant sa « normalité » (hôpital, banque, école, poste, commerces…).

Ilôt militaro-urbain créé quasiment ex-nihilo au milieu de l’océan, l’île est totalement dépendante de l’extérieure pour son fonctionnement journalier. On a tout importé (gravier, sable, béton, fer et acier) de Chine pour la construire, on continue à tout importé de vital pour la maintenir en fonctionnement (équipements, alimentation, énergie, eau…). Ainsi, une usine de dessalement d’eau de mer a été installée en 2016 afin de compléter les stocks d’eau potable apportés très régulièrement par bateau d’Hainan.
    
Une île minuscule au cœur du système géostratégique chinois en mer de Chine méridionale

Cette île minuscule occupe une place majeure dans le système chinois de projection militaire en mer de Chine méridionale. Les deux ports de sa base navale peuvent accueillir et abriter une importante flotte, de surface ou sous-marine. La longueur de la piste et les grands hangars attenants de sa base aérienne permettent l’atterrissage et la présence d’avions de combat et de bombardiers stratégiques à long rayons d’action.

On y trouve enfin toutes les activités supports nécessaires à la projection des forces aéronavales dans la mer de Chine méridionale (stockage de carburant, d’armements…). Et toutes les installations et unités de sécurisation, d’écoute et d’espionnage électronique (puissants radars, base de télécommunication, station de contrôle et d’écoute…).

 


Woody Island : vue générale

 

 


Repères géographiques

 

 


Image générale de Woody Island dans l’Amphitrite Group

 

 


Les travaux d’aménagement de l’île de l’Amphitrite Group

 

 

 

Zoom 2 - Le Crescent Group : l’extension vers l’ouest du contrôle archipélagique.

Le Crescent Group : un ensemble bien spécifique

A l’ouest de l’archipel - face au Viêt-Nam - et à environ 80 km des îles de l’Amphitrite se déploient les îlots, récifs et lagons du Crescent Group organisé en demi-cercle et ouvert vers le sud. Il est constitué de plusieurs îles minuscules (Drummond : 21 ha, Duncan 48 ha, Palm : 6 ha, Pattle Island : 31 ha, Robert), de hauts fonds (Observation Bank) et de récifs coralliens (Antelope Reef).

Comme le montre bien la différence de couleur de l’image, ce grand lagon présente deux niveaux de profondeur bien différents, entre le nord où les matériaux affleurent presque et le centre et le sud beaucoup plus profonds. Vieil héritage colonial de la 1er mondialisation, trois des îles portent le nom d’anciens dirigeants de la Compagnie britanniques des Indes orientales (Drummond, Pattle, Roberts).       

Duncan Island : une place singulière du fait de ses qualités

Située sur le versant occidental de l’archipel et au sein de Crescent Group, l’île de Duncan - comme Woody Island au nord – occupe une place singulière du fait de ses qualités.

Historiquement, c’est là que la France impériale - possédant alors l’Indochine - y installa entre 1932 et 1937 une station météorologique puis un phare et une station radio. En 1946, la France coloniale se réinstalle de manière permanente sur Pattle Island, avant de laisser la place au régime du Sud-Vietnam dans le cadre de la partition du pays en lutte pour son indépendance. En 1974, la Chine populaire profite de l’effondrement du Sud-Vietnam et de la réunification du Viêt-Nam, qui sort victorieux mais exsangue de ce long conflit de décolonisation, pour occuper ces îles et s’emparer ainsi de l’ensemble de l’archipel des Spratley.

Aujourd’hui encore, c’est sur Duncan Island que l’Armée Populaire chinoise a installé un puissant radar, une petite base navale, des hangars et un héliport pour couvrir l’ensemble.  Pour ce faire, les deux petites îles de Palm et Duncan ont été reliées entre elles par la construction d’une digue qui a agrandi et conforté l’ensemble de la structure. Puis cet ensemble a vu le creusement de deux vastes bassins intérieurs, dont le plus grand - de forme carrée et bien géométrique - est trés visible sur l’image.

 


Le Crescent Group : vue générale

 

 


Repères géographiques

 

 


 Duncan Island

 

 


Pattle Island

 

 

Images complémentaires

 

 


Vue générale de l’ouest de l’archipel des Paracels

 

 


Vue générale de North Reef

 

 


Vue générale de Bombay Reef

 

 

D’autres ressources

Sources

Sur le site Géoimage : enjeux maritimes frontaliers en Asie et affrontements de puissance

Laurent Carroué : Chine - Hainan : les bases navales de Yulin et Yalong, projection de puissance et conflits frontaliers en Mer de Chine méridionale
/geoimage/chine-hainan-les-bases-navales-de-yulin-et-yalong-projection-de-puissance-et-conflits

Laurent Carroué : Japon / Chine - Les îles Senkaku : souveraineté, frontières et rivalités de puissance en Mer de Chine orientale
/geoimage/japonchine-les-iles-senkaku-souverainete-frontieres-et-rivalites-de-puissance-en-mer-de

Laurent Carroué : Japon / Russie - Les îles Kouriles : un archipel frontalier très disputé du fait d’enjeux géopolitiques et géostratégiques majeurs
/geoimage/russie-les-iles-kouriles-un-archipel-frontalier-tres-dispute-du-fait-denjeux-geopolitiques


Bibliographie

Nathalie Fau et Benoît de Tréglodé (ss direct.) : Mers d’Asie du Sud-Est (chap. 4), CNRS Editions, Paris, 2018.

Didier Ortolland et Jean-Pierre Pirat : Atlas géopolitique des espaces maritimes, Editions Technip, 2010.

Laurent Carroué : « Géopolitique des mers et des océans » (chap. 9), in Philippe Deboudt (direct) :  Géographie des mers et des océans, Armand Colin, Paris, 2014.  

Laurent Carroué : Atlas de la mondialisation. Une seule terre, des mondes, collection Atlas, Autrement, Paris, 2020.  

Laurent Carroué : Géographie de la mondialisation. Crises et basculements du monde, collection U., Armand Colin, Paris, 2019.

Vincent Layer : « Les forteresses navales : passé, présent et avenir », Centre d’Etudes Stratégiques de la Marine, Revue Cargo Marine, n°5/2015.

Nathalie Fau : « La maritimisation de l’économie vietnamienne ; un facteur exacerbant les conflits entre le Viêt-Nam et la Chine en mer de Chine méridionale ? », Hérodote, 2015/2 n° 157. https://www.cairn.info/revue-herodote-2015-2-page-39.htm

Traduction en espagnol

 [Accéder à la traduction de ce dossier en espagnol]

Contributeur

Laurent Carroué, Inspecteur générale de l’Education nationale