La pointe méridionale du continent américain présente de fortes singularités. Située dans l’hémisphère Sud, elle est de loin la plus australe du continent, à seulement 970 km du continent antarctique. Elle fait face, d’un côté, à l’Afrique et au Cap de Bonne-Espérance (3 800 km), et de l’autre, à l’Australie et à la Tasmanie (2 500 km).
La longue chaîne des Andes s’y termine dans le vaste archipel de la Terre de Feu, partagé entre le Chili et l’Argentine, et se prolonge jusqu’au redoutable Cap Horn, situé en plein cœur des cinquantièmes rugissants.
Connectant les océans Atlantique et Pacifique, ce passage maritime — en particulier le détroit de Magellan — joue un rôle majeur dans la mondialisation depuis sa découverte en 1520.
Si ce choke point (passage obligé ou point clé dans le vocabulaire naval anglo-saxon) a perdu une grande partie de son importance géostratégique depuis l’ouverture du canal de Panama en 1914, il demeure loin d’être marginal sur le plan maritime, notamment en raison de l’augmentation des tonnages et des difficultés croissantes rencontrées par le canal de Panama.
Par ailleurs, la région connaît aujourd’hui une dynamique nouvelle, portée par le développement du tourisme austral, l’essor du pétrole et du gaz de schiste, et l’affirmation du Chili comme puissance antarctique.

Légende de l’image
Cette image du Sud de l'Amérique a été prise par un satellite Sentinel-2 le 31 octobre 2021. Il s’agit d’une image en couleurs naturelles de résolution native à 10m.
Présentation de l’image globale
Le détroit de Magellan et Punta Arenas : un choke point maritime revitalisé
A l’échelle continentale, nous sommes là au contact entre quatre grands ensembles spatiaux, d’échelle mondiale mais de qualités différentes. Premièrement, entre deux masses terrestres puisque le détroit du Passage de Drake plus au sud (hors image) sépare le continent américain du continent Antarctique, situé seulement 970 km plus au sud. Deuxièmement, entre deux masses maritimes avec l’océan Atlantique à l’ouest et l’océan Pacifique à l’est. Cette double clé d’analyse – Nord/Sud hémisphérique et Est/Ouest océanique – permet de mettre en perspective les dynamiques et mutations à l’œuvre dans ce « bout du monde ».
Un espace arctique désertique aux fortes contraintes
Les fortes contraintes bioclimatiques arctiques
Nous sommes ici dans la région de Puntas Arenas, petite ville située à 53°09’Sud dans les hautes latitudes de l’hémisphère Sud. A droite de l’image se déploient des hauts plateaux largement dénudés, au sud et au sud-est des chaînons montagneux d’orientation nord-ouest/sud-est couverts de neige au 31 octobre, en plein été austral.
La topographie et la morphologie témoignent de l’importance des héritages glaciaires. La dépression – et ses nombreux annexes - occupée par le Canal de Magellan correspond en effet à un puissant système de fjords, terme d’origine norvégienne qui définit une ancienne vallée glaciaire envahie par la mer. Sur l’image, les côtes apparaissent bien découpées et isolent un grand nombre d'îles, d'archipels, de péninsules, de canaux, de caps et de baies.
La région est dominée par un climat de toundra, arctique ou subarctique. Elle est en particulier balayée par de forts vents d’Ouest, les Cinquantièmes Rugissants, qui soufflent sur toute la pointe Sud du continent. Lorsqu’elle est visible en vert sur l’image face à l’importance des roches nues périglaciaires aux nombreuses tourbières, la végétation est pour l’essentiel composée de landes subpolaire de lichens, de mousses et de saules nains. La période du « soleil de minuit » s’étend en janvier sur 18 à 19 heures sur 24 heures, alors que l’hiver la période de la nuit polaire dure de 17 à 18 heures sur 24 heures en juin/juillet.
A Punta Arenas, bien située en position d’abri à 37 m. d’altitude, la ville est sous climat subpolaire océanique. Il se traduit par une température moyenne de 6°C, qui tombe à 1,4 °C en juillet contre 10 à 11 °C en janvier/février durant l’été austral. Depuis 1980, les relevés météorologiques témoignent des effets du changement climatique à travers des contrastes thermiques de plus en plus sensibles : on relève ainsi en 2019 un record de température de 28,7°C en février et un record de froid de -18°C en 1992.
Un système archipélagique émiettés : continent, presqu’îles et îles
Dans cette région de la Terre de Feu, une sensible opposition apparait entre la rive atlantique, contrôlée par l’Argentine, d’altitude assez basse et rectiligne à l’ouest et la rive pacifique et méridionale, contrôlée par le Chili, d’altitude plus élevée et qui s’émiette en une multitude d’archipels, de presqu’île et d’îles. L’image satellite est à la croisée de ces différents ensembles.
Ainsi, la péninsule de Brunswick, sur laquelle se trouve Punta Arenas et qui encadre à l’ouest le Détroit de Magellan se rattache au continent américain. Par contre à l’est, la Grande Ile de la Terre de Feu – l’Isla Grande de Tierra de Fuego - constitue un ensemble exceptionnel couvrant 47.992 km2 – soit la taille de la région Bourgogne Franche-Comté - culminant à 2 469 m. au Mont Shipton. Au sud, l’île Dawson appartient aux systèmes insulaires méridionaux. C’est d’ailleurs pourquoi les autorités et les acteurs régionaux ont pour habitude de distinguer d’un côté la zone continentale et de l’autre la zone insulaire.
Les structures topographiques et tectoniques de la région participent donc d’un vaste système péninsulaire et archipélagique en tout point exceptionnel à l’échelle mondiale. C’est dans ce lacis complexe de chenaux que Magellan va découvrir la voie maritime trans-océane qui porte désormais son nom et qui permet d’y naviguer en relative sécurité.
Le détroit de Magellan : un choke point maritime
La découverte et la mise en valeur d’un choke point de rang mondial
Plusieurs routes maritimes sont possibles pour faire le tour de la pointe de l’Amérique du Sud, qui voit passer au total 4900 navires en 2022. Le détroit de Magellan - Estrecho de Magallanes - entre la partie continentale et la Terre de Feu, est le principal passage en captant 2831 navires, soit 58 % des flux totaux, car il présente les distances les plus faibles et assure les conditions de sécurité les meilleures. Par rapport au passage de Drake, le passage par le détroit de Magellan est plus court et permet d’économiser 42 heures de navigation, à une vitesse moyenne de neuf nœuds dans des conditions météorologiques normales. Plus au sud, le canal Beagle, qui s’étend entre la Terre de Feu et l’île Navarino, offre une autre voie de passage possible, mais plus difficile (1626 navires en 2022, 33 %). Enfin, en pleine mer se trouve le passage de Drake, encore plus redoutable, qui demeure marginal avec seulement 438 navires (9 %).
Comme le montre bien l’image, le détroit de Magellan est une ancienne vallée glaciaire creusée lors des périodes froides par un gigantesque glacier qui prenait naissance dans la cordillère des Andes, au sud-ouest du détroit, et qui s'écoulait vers l'est en direction de l'océan Atlantique. A l'issue de la dernière glaciation il y a 10 000 ans, la remontée du niveau des mers s’est traduite par l’ennoiement de celle-ci. A la recherche d’un passage maritime entre l’Atlantique et le Pacifique, Fernand de Magellan entre dans le détroit par l’ouest et le Cap Virginies (Cabo Virgenes) le 21 octobre 1520 et en ressort sur l’océan Pacifique par le Cap Deseado le 27 novembre 1520, après donc un mois de navigation. Cette découverte va bouleverser les équilibres maritimes mondiaux antérieurs en ouvrant une nouvelle grande route maritime australe très éloignée géographiquement des grands centres économiques mondiaux mais connectant l’océan Atlantique et l’océan Pacifique et permettant ainsi une complète circumnavigation mondiale.
Les contraintes maritimes d’un puissant fjord
Pour autant, le détroit de Magellan présente de fortes contraintes de navigation. Long de 611 km, il se faufile par de multiples chenaux entre péninsules, fjords secondaires, îles, baies et caps comme le montre bien l’image. Malgré sa relative position d’abri, son climat inhospitalier peut être imprévisible, voire dangereux, et s’y traduit en particulier par des vents violents (cf. vents catabatiques williwaw, descendant des hautes terres), des brouillards et des tempêtes gênant la navigation.
Topographiquement, sa largeur varie de 2 à 20 milles, tout comme sa profondeur qui est de seulement 28 mètres près de l’île Magdalena mais de 1080 m. au phare de Cooper Key. Au total, le tirant d'eau maximum autorisé pour naviguer dans le détroit est de 70 pieds, soit 21,3 mètres. Cette profondeur permet le passage de porte-avions américain à propulsion nucléaire de la classe Nimitz, tels l'USS Ronald Reagan en août 2004 ou l’USS Carl Vinson en mars 2010. Si sa partie orientale couverte par l’image est largement sécure, la partie centrale et orientale qui débute à l’ouest du Cap Froward – qui sert de limite interne entre Atlantique et Pacifique - est étroite, parfois dominée par de hautes falaises et présente des hauts fonds correspondants à des seuils qui y rendent la navigation difficile. De plus, les sites de grands mouillages y sont très restreints.
A ceci s’ajoutent la puissance des marées et des courants marins. Côté Atlantique (cf. image), l’amplitudes des marées moyennes et de vive-eau est de 7 et 9 m. de hauteur, contre seulement 1,1 et 1,2 m. du côté Pacifique. Si dans la Bahia Felipe le potentiel d'énergie marémotrice est énorme, son exploitation demeure donc un vrai défi d’avenir. Les masses d’eau en déplacement sont donc considérables, produisant de forts courants de marée, pouvant atteindre des vitesses allant jusqu'à 8 nœuds (soit 14,8 km/h.).
La sécurisation de la traversée maritime
Au plan géopolitique et conformément aux traités internationaux entre le Chili et l’Argentine, l'accès et la navigation dans le détroit de Magellan sont accessibles aux navires de toutes les nations, à tout moment et dans toutes circonstances. Tout entier en territoire chilien, mais bordé à l’est par l’Argentine, les autorités chiliennes, dont bien sur la Marine militaire – Armada de Chile créée en 1817, en assurent le contrôle et la sécurisation. Comme le montre le graphique, le nombre moyen de navires se monte à 2000 unités par an entre 1997 et 2007 avant de connaitre une sensible augmentation - 3500 et 2021 - dans les années 2020, du fait pour l’essentiel de la sensible hausse du trafic chilien en lien sans doute avec le boom des hydrocarbures.

Sous l'autorité de la direction générale du territoire maritime et de la marine marchande (DIRECTEMAR), sa sécurisation – en particulier la nuit - repose sur un triptyque : des équipements balisant l’axe de navigation, un service de pilotage maritime afin d’aider les capitaines des navires en transit et enfin l’assistance de remorqueurs de haute mer. De la pointe Dungeness à l'archipel Evangelistas sont installés au total 27 phares et 9 balises, soit 36 équipements. Cinq phares sont habités en permanence par du personnel naval qui surveille et informe le trafic maritime. Il s'agit des phares : Evangelistas, San Félix, Fairway, Punta Delgada et Dungeness. Dans la partie orientale du détroit couverte par l’image, de bonnes zones de mouillage ou d’attente disposant parfois de 30 m. de profondeur existent dans la zone de transfert pilote, dans les baies de Bahia Posesión, Gregorio et Felipe et dans les ports de Punta Arenas et de Fortescue.
Enfin, à défaut de pont, il existe deux traversées du détroit de Magellan en ferry qui relient le continent sud-américain à la Terre de Feu. La première, orientée nord-sud, relie la pointe Delgada à la baie Azul. La durée de la traversée est de 30 minutes environ. Le service n'est pas régulier et dépend des conditions climatiques. La deuxième, orientée est-ouest, relie la ville de Punta Arenas à Porvenir.

Saisir, organiser et aménager un espace marginal
La Région « Magallanes et Antarctique chilien » et la projection chilienne sur le continent Antarctique
Administrativement, nous sommes dans la Région « Magallanes et Antarctique chilien » dont le seul nom témoigne des revendications chiliennes sur une partie du 6em Continent antarctique. Elle est composée de quatre provinces très étendues mais sous-peuplées, voire désertiques : Ultima Esperanza (0,3 hab./km²), Tierra del Fuego (0,29 hab/km²) et Magallanes dont les plus hautes densités (3,5 hab./km²) sont dues à la présence de Punta Arenas, la capitale régionale. Comme on peut le constater, les fortes contraintes naturelles pèsent ici de tout leur poids.
Dans ce cadre, une mention spéciale doit être accordée à la commune d’Antartica, qui est fondée en 1961 afin de couvrir tout le Territorio Chileno Antártico d’une superficie de 1,2 million km², qui représente la partie du continent Antarctique dont le Chili réclame la souveraineté. Elle est rattachée à la commune du Cap Horn (Cabo de Hornos, 0,11 hab./km²) et ne compte officiellement que 130 habitants. Le siège de la commune de Cabo de Hornos est Puerto Williams, une petite agglomération de 2.800 habitants située sur l’île de Navarino sur le canal de Beagle. Elle est créée à partir de l’installation en 1953 d’une petite base navale par la marine chilienne et est le lieu d’habitat permanent le plus méridional au monde.
Conflits géopolitiques et tracés frontaliers
Dans cette extrémité méridionale du Nouveau Monde, la question des tracés frontaliers entre le Chili et l’Argentine n’a été réglée définitivement que tardivement avec la signature du Traité de Paix et d'Amitié - Tratado de Paz y Amistad de 1984 entre Chile y Argentina - paraphé au Vatican le 29 novembre 1984. Si dans la région de Puntas Arenas et du détroit de Magellan le tracé rectiligne de la frontière, qui passe juste à l’est de l’image, ne posait pas de problème, le différend frontalier portait au sud de l’entrée du Passage de Beagle sur l’appropriation des trois îles de Lennox, Nueva et Picton.
Dans un contexte bilatéral trés tendu, ce différent faillit provoquer une guerre entre les deux États en 1978 avant que la défaite de l'Argentine dans la guerre des Malouines et la chute de la dictature militaire argentine en 1983 permettent un règlement du différend soumis à l’arbitrage de la Papauté qui accorda les trois îles disputées au Chili.
Punta Arenas : les rêves énergétiques et antarctiques de la puissance chilienne
Punta Arenas : la capitale politique et économique de la région
Fondée en 1848 dans le cadre de la colonisation de la région, la ville de Punta Arenas est située à l’est de la péninsule de Brunswick. Historiquement, Punta Arenas, tout comme Rio Gallegos en Argentine, sont des haltes bienvenues sur ces routes maritimes, incontournables jusqu’à l’achèvement du chemin de fer transcontinental étasunien en 1869 puis l’ouverture du Canal de Panama en 1914.

Protégée à l’ouest par les hauteurs, elle est bordée par le Canal de Magellan. A partir de la valorisation du site du petit delta du Rios de la Minas, la ville va s’étendre le long du littoral vers le nord (université, zone franche, port, zones industrielles) jusqu’à l’aérodrome situé à 20 km et vers le sud. Dans ces régions vides (1,3 hab./km2), la commune – très étendue puisque couvrant 17 800 km2 - polarise avec 124 000 habitants 79 % de la population régionale et l’essentiel de l’économie.

Les traditionnelles activités structurées par l’élevage ovin et la conserverie des produits de la pêche sont aujourd’hui largement complétées par les activités portuaires et le renouveau gazier ; le développement d’un tourisme austral, d’échelle nationale et internationale, tourné vers la découverte de la Terre de Feu et l’Antarctique (croisières) et, enfin, les fonctions régaliennes civiles et militaires de protection et de secours (sécurisation de la voie maritime...). Enfin, Punta Arenas est la capitale de la Région de Magallanes et de l’Antarctique chilien. Les fonctions traditionnelles de services à la population (santé, éducation...) et à l’économie sont complétées aujourd’hui par des fonctions nationales liées aux rêves de projection antarctique de la puissance chilienne. La ville est en particulier le point de départ des expéditions australes et le siège de l’INAC, l’Institut National Antarctique Chilien.
Le renouveau pétrolier et gazier fondé sur la fracturation hydraulique
Mais l’économie de Punta Arenas est aussi dopée par le boom énergétique. La découverte du premier gisement de pétrole du pays sur l'île de la Terre de Feu en décembre 1945 ouvre un front pionnier énergétique dans cette région jusqu’ici trés marginale. Il est porté par la création de L'ENAP - Empresa Nacional del Petróleo en 1950 qui multiplie les investissements dans la région et bouleverse l’organisation territoriale : construction des centres d’habitat de Cerro Sombrero, Cullen, Posesión et Gregorio, du terminal maritime de Puerto Sara, de la raffinerie de Gregorio, de l’usine de Cabo Negro... Pour accompagner son développement, l’ENAP construit des milliers de kilomètres de pistes et de route, des écoles et des centres d’enseignement supérieur pour la formation de sa main d’œuvre, des réseaux de télécommunication et - surtout - de tubes (oléoducs et gazoducs) interconnectant ses différents établissements.
Un premier pic de production est atteint dans les années 1980 avec la mise en exploitation de plateformes offshore dans le nord du détroit de Magellan. L’ENAP devient ainsi un acteur économique régional majeur avec 1 000 emplois directs, 1 800 emplois indirects et induits et environ 10 % du PIB du territoire. Mais à la fin des années 1990, l’épuisement des gisements traditionnels d’hydrocarbures marque la fin d’un cycle et oblige à d’importants efforts de prospection.
Depuis la décennie 2000, c’est une innovation technologique majeure lancée dans le Bassin permien au Texas qui va lancer un nouveau cycle énergétique. L’accent est en effet mis sur la découverte et la mise en exploitation de nouveaux réservoirs non-conventionnels grâce à la mobilisation des technologies de fracturation pouvant valoriser des gisements entre 2.800 et 3.750 m. de profondeur. Comme le montre la carte, l’espace régional est partagé en blocs terrestres ou offshore. L’ENAP réalise ainsi des dizaines de puits dans les blocs 8 – Arenal et 4 – Dorado qui encadrent le nord du Canal de Magellan. Cette activité permet de couvrir les besoins énergétiques de la région, d’alimenter le centre du Chili et d’exporter.
Zoom d’étude
Le Cap Horn : l’extrémité australe de l’hémisphère américain
Le Cap Horn : le plus méridional des grands caps
Cette image couvre l’Isla Hornos, rattachée administrativement à la commune de Cabo de Hornos. Dans cette l’île déserte longue de 6 km et large de 2 km, la seule présence humaine se trouve sur la pointe sud-est avec le phare et la petite station de la Marine chilienne. Au sud, la pointe qui culmine à 425 m. tombe dans la mer sur le Cap Horn, ou Cabo de Hornos.
A l’échelle du globe, celui-ci est le plus au sud des grands caps. En effet, le Cap Horn se trouve en latitude à 55°58’Sud, dans les 50em Rugissants donc, alors que le Cap de Bonne Espérance en Afrique du Sud à la pointe la plus méridionale de l’Afrique se trouve seulement à 34°21’Sud. Mesurons les effets sur la distance de telles situations : Le Cap est à 3 900 km du continent Antarctique contre seulement 945 km pour le Cap Horn, il est quatre fois plus près de l’Antarctique que la pointe méridionale de l’Afrique.
Le détroit du Passage de Drake : un effet d’entonnoir à l’échelle du globe
Au sud hors image, le détroit du Passage de Drake – du nom du marin britannique Sir Francis Drake qui y passe en 1578 - sépare le continent américain du continent Antarctique et voit converger les eaux de l’océan Atlantique et de l’océan Pacifique. S’étendant entre le 56°Sud et le 62°Sud, ce détroit voit s’engouffrer dans un goulet de seulement 950 km de large les énormes flux maritimes du courant circumpolaire antarctique - évalués à 135 millions m3/seconde - qui jouent un rôle majeur à l’échelle du globe, tant au plan maritime que climatique. Sa profondeur moyenne est de 3 400 m, mais certaines fosses peuvent atteindre les 4 800 m. Les vents dominants aux latitudes situées sous le 40° Sud peuvent souffler d’ouest en est autour du globe en étant à peine interrompus par les terres, donnant naissance aux « Quarantièmes rugissants » et aux encore plus violents « Cinquantièmes hurlants » et « Soixantièmes stridents ».
Mais passer le cap Horn impose aux bateaux de pousser au-delà de 56° Sud. Les navires marchands, bateaux de pêche, paquebots de croisière - en plein développement - et navires de plaisance (cf. Vendée Globe) y parcourent donc des eaux particulièrement dangereuses et éprouvantes (très puissant courant marin Ouest/est, très forts coups de vent de plus de 60 nœuds, hautes vagues de 10 à 15 m. de creux mais avec des « vagues scélérates » de plus de 30 m. particulièrement redoutées des marins, brouillards, tempêtes, icebergs...). A l’époque Moderne face à la puissance des vents et des courants, certains navires pouvaient mettre deux à trois mois avant de pouvoir passer dans l’océan Pacifique alors que depuis sa découverte au XVIIème siècle, on relève plus de 800 naufrages causant des dizaines de milliers de disparus.

Images complémentaires
Situé à 140 km au sud de Punta Arenas et immédiatement au sud le l’Ile Dawson (mais hors image), le Mont Sarmiento (2 246 m) et sa belle calotte de glace se trouvent en Terre de Feu, dans le Parc National Alberto Agostini. Il tombe dans le canal Magdalena et marque la limite occidentale de la Cordillère de Darwin. Cette image témoigne de l’importance des appareils glaciaires et des conditions extrêmes que peut parfois connaitre la région.
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Mont Sarmiento
D’autres ressources
Sur le site CNES Géoimage :
Sites
- Site du gouvernement regional de la Región de Magallanes y de la Antártica Chilena dont le siège est à Punta Arenas
https://www.goremagallanes.cl/wordpress/ - Région de Magallanes. Cartes en ligne
https://magallanesbordecostero.cl/documentos/ - Centre Antarctique
https://www.centroantartico.cl/ - Instituto Antártico Chileno (INACH) – Institut Antarctique Chilien
https://www.inach.cl/inach/?p=29870
Auteur
Laurent Carroué, Inspecteur général de l’Éducation nationale, du sport et de la recherche, directeur de recherche à l’Institut Français de Géopolitique (Université Paris VIII)