Publié le 6 février 2024
La mer de Weddell, réputée pour son climat froid, ses icebergs et ses glaces de mer, revêt une importance cruciale dans la recherche scientifique. Située à l’Ouest de la péninsule Antarctique, cette mer est étudiée par les chercheurs pour obtenir des informations sur la dynamique de l'environnement et son rôle dans le système climatique. Le passage du plus grand iceberg actuel nommé « A23a » n’a pas échappé à la vigilance de SWOT, offrant ainsi un éclairage supplémentaire sur cet iceberg atypique.
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Ces images exceptionnelles, prises par le satellite entre septembre et novembre 2023, témoignent des capacités inédites de SWOT, au-delà des objectifs du cœur de mission. Tout au long des bandes latérales, appelées fauchées, chacune large de 50 km environ, on peut observer deux types d’information.
D’une part, les images en couleur renseignent sur la topographie précise des océans et de la glace. Les tons rouges représentent les zones d’eau élevées, tandis que les tons bleus sont utilisés pour les zones d’eau plus basses. La texture fragmentée de la topographie centrale, avec ses émiettements de jaune et de rouge, montre la présence de glace craquelée. Plus au nord, l’eau apparaît, avec une texture très lisse des structures étirées par la présence de tourbillons océaniques.
D’autre part, ces données sur la glace et les tourbillons nous sont confirmées grâce aux images en noir et blanc qui offrent des informations sur la rugosité de la surface. Les tons clairs signalent une eau agitée tandis que les tons sombres indiquent la présence de glace ou de neige qui sont plus sombres pour ce radar en bande Ka.
Un œil observateur repérera sur l’animation l’iceberg A23a flottant au gré des courants océaniques vers l’ouest. En couleur, ce dernier présente des nuances de rouge et de bleu reflétant son altimétrie variable, tandis qu’en noir et blanc, il est représenté par un niveau de gris intermédiaire caractéristique de l’eau gelée. L'analyse des données SWOT révèle que la trajectoire de l'iceberg dans la mer de Weddell est fortement influencée par les dynamiques océaniques locales. Le mastodonte de 4 000 km2 suit lentement le tourbillon océanique de la région, le guidant depuis l'ouest vers le nord, au plus près des voies maritimes, des îles habitées par la faune sauvage et des eaux chaudes de l'océan Austral, réputées pour leur capacité à accélérer le processus de fonte de la glace.
Plus spectaculaire encore : lors de la bascule ou de la fragmentation des icebergs, on connaissait l’existence de mini-tsunamis sans jamais les avoir observés à grande échelle depuis l’espace. SWOT observe périodiquement la formation et la dispersion de ces mini-tsunamis. Sur l’image satellite ci-dessous, on distingue une onde de gravité en surface comme si une pierre avait été jetée dans un étang.
Ces mini-tsunamis d’amplitude modeste (ici une dizaine de centimètres) se dispersent ensuite sur des dizaines à des centaines de kilomètres. Ils ont toujours en leur centre un ou plusieurs icebergs. Ces ondes se forment à la surface de l’eau lorsque les icebergs se fracturent ou chavirent en basculant à 90° lors de leur fonte, déplaçant d’énormes quantités d’eau, comme la pierre entrant dans l’eau de l’étang. Les propriétés de cette onde permettent d’en déduire des propriétés uniques sur les fragmentations et autre bascules très rarement observées in-situ en plein océan austral.
En résumé, ces différentes images illustrent la capacité exceptionnelle de SWOT à fournir des mesures en 2D de hauteur d’eau ou de glace, précises et répétées, par tout temps. Grâce à son radar interférométrique, SWOT peut imager la glace et son épaisseur en présence ou non de nuages, dans des régions où les capteurs optiques sont souvent aveugles. Ces données seront précieuses pour sécuriser la trajectoire des navires en route polaire (ex : course du Vendée Globe) pour qui les icebergs et leurs fragments représentent une menace.
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En savoir plus sur SWOT
Lancée en 2022 depuis la base de Vanderberg en Californie, SWOT est une mission en coopération entre le CNES et la NASA avec des contributions de l’Agence spatiale canadienne (ASC) et de l’Agence spatiale du Royaume-Uni (UKSA). Son objectif ? Fournir des mesures à haute résolution de la hauteur des océans et des surfaces d’eau continentales du monde entier, avec une précision inégalée. Elle permettra de mieux comprendre le rôle de l’océan dans le changement climatique et aidera les communautés locales à surveiller et à planifier les changements dans les ressources en eau et les effets de la montée des eaux.