L'Osmington Horse constitue un exemple de restauration d'un géoglyphe des collines du Dorset en Angleterre. Il est devenu une des attractions touristiques de la région.

Au centre de cette image, on distingue le cheval blanc d’Osmington — l’Osmington White Horse — dans la campagne du sud de l’Angleterre, où l’on retrouve les paysages cultivés et vallonnés typiques de cette partie du pays. Nous sommes dans le Dorset (376 000 hab., 2 653 km², 142 hab./km²).
L’Osmington Horse se situe à quelques kilomètres au nord-est de Weymouth, petite ville côtière et touristique. On aperçoit ici seulement Sutton Poyntz et Preston, deux zones résidentielles situées au nord-est de l’agglomération de Weymouth (66 000 hab.), dont elles font partie. L’agglomération comprend également Portland, la presqu’île située au sud de Weymouth. Le village en bas à droite de l’image est Osmington, qui donne donc son nom au « cheval ». En haut à droite se trouve le village de Broadmayne. Enfin, la portion maritime que l’on aperçoit tout en bas de l’image appartient à la baie de Weymouth.
L’Osmington Horse est un géoglyphe — l’étymologie du mot renvoie à une gravure dans le sol — qui porte le nom de la colline dans laquelle il a été taillé. C’est une colline de craie appartenant aux Dorset Downs — les Collines du Dorset, un ensemble de reliefs crayeux formant la partie occidentale d’une dorsale plus vaste du même type qui s’étend sur tout le sud de l’Angleterre, du Dorset à l’ouest jusqu’au Kent à l’est, en englobant le Hampshire, le Wiltshire, le Surrey ainsi que l’East Sussex et le West Sussex, prolongée même dans une partie du Bassin parisien. Cet ensemble de terres vallonnées et arables culmine à une altitude inférieure à 300 m. C’est une région d’Angleterre très anciennement peuplée ; on y trouve la plus forte concentration de sites préhistoriques du pays, avec des traces d’activité humaine vieilles de 8 000 ans.
Les Dorset Downs se situent dans une partie de l’Angleterre bénéficiant du statut de National Character Area (« Zone de caractère national »). Cette zone rurale, agricole et vallonnée, comme le révèlent les nuances de couleurs, se caractérise par de grands champs souvent délimités par une végétation haute — haies, petits arbres — typique de la région. On remarque également de rares et éparses petites zones boisées. Les parcelles sont consacrées aux pâturages et à l’agriculture ; on distingue nettement les sillons sur les terres dédiées aux cultures fourragères et céréalières. La production agricole demeure une activité traditionnelle du Dorset, bien qu’elle ne contribue plus qu’à 2 % de la richesse créée et n’emploie qu’environ 3 000 actifs.
En bas à droite de l’image, deux installations soulignent le caractère touristique de la région : tout à droite, le centre de vacances Osmington Bay profite d’un accès direct à la plage ; plus à gauche, les champs d’une ferme ont été transformés en un vaste camping temporaire, typique des emplacements ouverts lors de festivals. De nombreux festivals sont organisés chaque année à Weymouth, dans le Dorset et, plus largement, dans les comtés du sud de l’Angleterre, notamment au printemps et durant l’été. Ils constituent une attraction touristique importante et participent au dynamisme économique de la région. La date de cette image — 26 août 2016 — coïncide avec le bank holiday de fin août : Weymouth et Portland accueillaient alors un festival de musique et une compétition de voile, d’où cette concentration de campeurs. Dans le Dorset, le tourisme emploie environ 7 000 personnes et représente 5 % de l’activité économique du comté. Nous sommes ici sur le balcon maritime méridional de l’Angleterre : en quelque sorte, un mélange de Bretagne, de Normandie et de Côte d’Azur pour les Îles Britanniques.
Une construction originale née au début du XIXᵉ siècle, mais pas unique
L’Osmington Horse participe pleinement de l’identité régionale de cette partie de l’Angleterre et constitue une attraction touristique. Gravé en 1808, il mesure environ 85 m de long et 98 m de haut. Il représente le roi George III sur son cheval, s’éloignant de Weymouth. Bien que cette représentation ait vraisemblablement été conçue comme un hommage au souverain, qui fréquentait régulièrement la région avec sa cour — on disait alors que Weymouth était « le centre de l’Empire » —, la légende veut que le roi, offensé par l’orientation du cheval, ne soit plus jamais revenu après l’avoir vue. En réalité, la création de l’œuvre coïncide avec la fin du règne de George III ; sa santé déclinante l’empêcha sans doute de voyager, et il ne constata jamais la preuve de loyauté de ses sujets. Quoi qu’il en soit, les fréquentes visites royales marquèrent le début de la popularité de Weymouth comme lieu de villégiature estivale.
L’art de graver des représentations sur les collines — les hill figures — est très ancien et demeure mystérieux : certains exemples remontent à la préhistoire, comme le cheval d’Uffington, dont la datation reste incertaine. Le sud de l’Angleterre conserve de nombreux géoglyphes, souvent créés aux XVIIIᵉ et XIXᵉ siècles. L’Osmington Horse est le seul à associer monture et cavalier. On recense au moins vingt-quatre chevaux (certains aujourd’hui effacés) et deux silhouettes humaines, les plus célèbres étant les géants de Wilmington (Sussex) et de Cerne Abbas (Dorset), ainsi que les chevaux blancs d’Uffington (Oxfordshire), de Bratton/Westbury (Wiltshire), de Kilburn (Yorkshire) ou encore de Cherhill (Wiltshire). Ces gravures confèrent une identité particulière aux régions où elles se trouvent ; le cheval blanc est ainsi considéré comme l’emblème du Wiltshire.
Une restauration nécessaire mais complexe
Ces représentations sont faites pour être vues de loin, à condition d’être entretenues : la pousse de la végétation, le vent et la pluie en altèrent progressivement les contours. Des restaurations maladroites peuvent également les dénaturer ; ce fut le cas de l’Osmington Horse. Lors d’une première restauration, en 1989, 160 tonnes de roches calcaires importées de Portland furent ajoutées, qu’il fallut ensuite retirer.
Le projet de restauration actuel a été lancé en mai 2009, puis mené de juillet 2010 à septembre 2011, afin de redonner à la figure son aspect originel avant les Jeux olympiques de 2012, dont les épreuves de voile se déroulaient à Weymouth. La restauration reçut l’approbation royale en 2012. Conduit par des bénévoles locaux, le chantier bénéficia de l’appui d’organismes tels que le Dorset Rangers Service, le Historic Environment Service du Dorset, le Dorset Area of Outstanding Natural Beauty Partnership, English Heritage, Natural England et Ordnance Survey, l’agence cartographique nationale.
Le projet dut composer avec la pente de la colline, l’évacuation des 160 tonnes de pierres, le manque d’archives sur le tracé d’origine, l’absence de financements publics (le site est privé) et les contraintes liées à son classement Site of Special Scientific Interest, limitant la circulation des engins. Le financement fut finalement assuré par le programme Higher Level Stewardship de Natural England et par le travail bénévole des habitants et des experts.
Déterminer le tracé originel constitua un défi majeur : recherches iconographiques, analyses de sols, recours à la télédétection et à la géolocalisation firent apparaître les modifications successives de la figure. La restauration du dessin initial permit à Ordnance Survey et à l’English Heritage National Monuments Record de l’officialiser définitivement pour les générations futures.
Pour aller plus loin :
À propos des gravures :
- http://www.osmingtonwhitehorse.info/
- https://www.bbc.com/news/uk-england-39255651
- http://www.ancientpages.com/2018/09/20/mystery-of-prehistoric-gigantic-hill-figures-of-england/
- https://www.dorsets.co.uk/osmington
- http://publications.naturalengland.org.uk/publication/5846213517639680?category=587130
À propos du Dorset :
- https://www.dorsetcouncil.gov.uk/business-consumers-licences/economic-development/western-dorset-economic-growth-strategy/what-are-our-key-sectors.aspx
- https://apps.geowessex.com/insights/Dashboards
- https://apps.geowessex.com/insights/Topics
Auteur :
Fabien Jeannier, professeur d’anglais, chercheur associé au laboratoire Identité culturelle, textes et théâtralité, Avignon Université.