29 Mai 2018

[Entretien] Kader Amsif : "Atteindre notre accessible étoile"

Alors que le Programme des Nations Unies pour l'Environnement célébrait ce mois-ci la Journée mondiale du Soleil, Kader Amsif, responsable des programmes Soleil, héliosphère et magnétosphères au CNES, nous en dit plus sur notre étoile, qui sera bientôt approchée de très près par 2 missions : l'une américaine et l'autre européenne.
Pourquoi s’intéresse-t-on au Soleil d’un point de vue scientifique ?

Kader Amsif : Il y a un intérêt direct à étudier le Soleil : c’est un objet très important qui a permis et qui maintient la vie. Mieux le connaître nous permet d’anticiper les effets potentiels de notre étoile sur l'environnement spatial de la Terre dont nous dépendons de plus en plus et dont l'étude est communément appelée la météorologie de l'espace.

D’un point de vue très concret, la météorologie de l’espace a des conséquences visibles sur la Terre : chaque seconde, une tonne de particules et de matière sont éjectées du Soleil, dont une certaine partie parvient dans l’environnement terrestre. Cela donne des manifestations sympathiques comme les aurores lumineuses que l’on observe aux pôles, mais aussi des effets plus graves comme des black-out électriques, des perturbations radio et des satellites endommagés.

Aujourd’hui, nous dépendons de plus en plus des technologies. Il y a donc un vrai enjeu sociétal à s’intéresser au Soleil. Peut-être pas pour prévoir la météorologie de l’espace, mais pour maîtriser davantage ce qui peut nous arriver sur Terre

Quel est l’objectif des deux missions Parker Solar Probe et Solar Orbiter, qui seront prochainement lancées ?

K.A : Il y a une synergie entre ces deux missions. Parker Solar Probe est une sonde américaine de la NASA qui sera lancée cet été. Les Américains la présentent comme la mission qui va aller toucher le Soleil, et c’est vrai qu’elle va s’en approcher comme jamais on ne l’a fait auparavant. Dès l’automne, elle sera à 25 millions de kilomètres du Soleil, et dans cinq ans à 7 millions de kilomètres. Pourquoi aller aussi près ? La sonde va atteindre la couronne solaire, l’atmosphère extérieure de notre étoile, qui intrigue énormément par la forte élévation de température constatée au fur et à mesure qu’on s’éloigne de la surface du Soleil. Parker Solar Probe va multiplier les mesures in situ pour essayer de comprendre son fonctionnement global, et en particulier ce phénomène de chauffage sans doute lié aux ondes électromagnétiques.

Lancée en 2020, Solar Orbiter est complémentaire de Parker Solar Probe. Cette mission de l’ESA s’approchera à 40 millions de kilomètres du Soleil, à l’intérieur de l’orbite de Mercure, pour faire des mesures in-situ mais aussi de télédétection permettant d’observer le Soleil dans sa globalité avec pour certain instrument une résolution inédite de 200 kilomètres. Après 5 ans d’observation, il est prévu que le satellite sorte du plan de l’écliptique pour explorer les hautes latitudes. On s’attend à voir le Soleil comme on ne l’a jamais vu, et à en savoir davantage sur le vent solaire.

 

Le rôle du CNES

Sur Parker Solar Probe, la France a fourni le seul instrument européen de la sonde, un search coil ou magnétomètre qui permet la mesure du champ magnétique dans trois directions différentes. Il a été développé par le CNES avec le laboratoire LPC2E du CNRS, à Orléans.

Sur Solar Orbiter, la contribution française concerne 6 des 10 instruments de la mission, dont une est la fourniture complète de l’instrument RPW (Radio and Plasma Wave analyzer), développé sous maîtrise d’œuvre CNES sous la responsabilité scientifique du LESIA (Observatoire de Paris).

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A propos de Parker solar probe

En 2018, la sonde américaine Parker Solar Probe débutera son voyage vers le Soleil. Son objectif ? Devenir le premier engin à pénétrer l'atmosphère extérieure de notre étoile. Arrivée prévue en 2024. En savoir plus.

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A propos de Solar Orbiter

Se rapprocher du Soleil pour étudier son atmosphère et l’observer avec une résolution jamais atteinte jusqu’ici. Telle sera la mission de Solar Orbiter, un satellite de l’ESA qui sera lancé par la NASA en 2020. Avec à la clé, la possibilité de percer les secrets du vent solaire. En savoir plus.

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