13 Juin 2022

Challenge R&D Transport spatial : portraits de lauréats

En 2021, les entreprises Blackleaf et CES Works ont été sélectionnées par le CNES dans le cadre des Challenges R&D organisés par la Direction du Transport Spatial. Alors que leurs projets sont en cours de développement, leurs dirigeants témoignent de cette expérience.
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Système de lancement (illustration) Crédits : CNES

Le CNES favorise le développement de l’écosystème du spatial en organisant une nouvelle édition des Challenges R&D dans le domaine du transport spatial. Ces challenges ont pour vocation de sélectionner des entreprises et laboratoires pour aider à la montée en maturité de solutions innovantes qui pourront répondre aux enjeux futurs du transport spatial. L’année dernière, ce dispositif avait permis d’initier des partenariats avec 19 entreprises. Parmi les lauréats au 1er rang qui ont bénéficié d’un contrat de collaboration et d’une enveloppe de 100 000€ figurent Blackleaf et CES Works

Le graphène, matériau stratégique de Blackeaf

Blackleaf, entreprise créée à Strasbourg en 2018, a développé une solution écologique pour produire du graphène, matériau obtenu par transformation du graphite aux propriétés très intéressantes pour l’industrie. Il s’agit d’un conducteur thermique et électrique exceptionnel, 200 fois plus résistant que l’acier, il est imperméable et extrêmement léger. Dans le cadre du challenge, l’entreprise a proposé d’utiliser des revêtements en graphène pour 3 types d’applications sur les lanceurs : pour réchauffer des surfaces ou au contraire refroidir certaines zones des véhicules spatiaux, et pour dissiper des charges électrostatiques. « Le jury a considéré qu’il y avait une opportunité à s’emparer de ce matériau stratégique et à le tester sur des applications spécifiques. Nous sommes disruptifs sur le sujet, nous produisons en France et dans des quantités semi-industrielles et en consommant peu d’énergie. Il y a aussi la question du poids qui est fondamentale quand on parle du spatial », explique Yannick Lafue, dirigeant de Blackleaf.

A l’issue du challenge, l’entreprise a lancé au début de l’année des études de R&D pour évaluer sa technologie par rapport aux besoins futurs du CNES. « Les premiers résultats montrent que le matériau atteint les performances souhaitées sur la partie chauffage, et nous sommes confiants sur les charges électrostatiques. L’idée est de poursuivre ensuite sur une phase de prototypage », poursuit Yannick Lafue. Au-delà de ce projet, le challenge a donné à Blackleaf l’opportunité d’entrer dans le secteur spatial où elle n’était pas présente jusqu’alors.

Nous avons gagné en visibilité, et nous avons suscité de l’intérêt pour le graphène dans le domaine des lanceurs, mais aussi des satellites et de l’outillage. Cela nous ouvre de nombreuses portes.

Yannick Lafue, dirigeant de Blackleaf

L’atterrisseur pour 2e étage de CES Works

Autre lauréat, CES Works est une holding active en charge de la R&D amont du groupe CES WORKS et du développement de solutions disruptives propriétaires, sur le modèle des start-up studios. L’entreprise est déjà active dans les domaines du spatial – elle a notamment travaillé sur des développements dans le cadre du programme Galileo, du programme Fermi-Glast et a été lauréate du concours d’innovation I-Nov –, de l’aéronautique, des mobilités et de la défense. Dans sa réponse au challenge R&D lanceurs, elle a proposé un système de train d’atterrissage monitoré permettant de récupérer l’étage supérieur d’un lanceur type Ariane Next en vue de sa réutilisation. « Nous avons imaginé “l’équivalent” d’une suspension de voiture à l’échelle d’un lanceur qui intègre une fonction amortisseur novatrice, afin d’absorber le choc au moment du contact avec le sol, décrit Yves-Henri Grunevald, dirigeant de CES Works. L’idée est d’utiliser une structure souple en composite afin de minimiser la charge supplémentaire pour le lanceur, et de conserver la même capacité de mise en orbite. Pour cela nous travaillons aussi sur l’architecture du 2e étage, afin de gagner de la masse ailleurs. » 

A l’issue du challenge, CES Works a immédiatement commencé à travailler sur un pré-design de sa solution pour en démontrer la faisabilité théorique. « La vraie question est de savoir comment intégrer au mieux un atterrisseur, précise Yves-Henri Grunevald. D’ici la fin de l’année, notre dernier livrable viendra conforter ce que nous avons déjà fourni et ouvrira, nous l’espérons, la porte à d’autres opportunités, comme travailler sur l’applicabilité de la solution sur un 1er étage en réalisant un démonstrateur instrumenté à l’échelle 1/20e. » Pour le chef d’entreprise, ce type de challenge offre une vraie opportunité de travailler très en amont sur des problématiques futures et de montrer la capacité et la crédibilité de sa société sur ces enjeux stratégiques.

Les échanges entre notre structure de 10 personnes et les experts du CNES, qui sont les références du domaine en Europe, sont particulièrement intéressants. J’ai particulièrement apprécié l’agilité du dispositif et la grande autonomie dans laquelle nous travaillons.

Yves-Henri Grunevald, dirigeant de CES Works