18 janvier 2008
Un gigantesque nuage d’antimatière
Chacun sait que mises en présence, matière et antimatière s'annihilent mutuellement en énergie. L’origine du double négatif de la matière, dont les particules sont appelées « positons », stimule depuis longtemps l’imagination des physiciens, qui ont proposé des explications plus ou moins exotiques. L’une des plus étranges invoque la mystérieuse matière noire, dont l’existence est controversée. Une étude publiée le 10 janvier 2008 dans la prestigieuse revue Nature suggère cependant une toute autre piste.

C’est une légère asymétrie dans le nuage d’antimatière qui se trouve au centre de la Voie Lactée qui a aiguillé les scientifiques. Rien n’était pourtant gagné d’avance.

Stupéfaction dans le petit monde de l’astrophysique : les objets et phénomènes classiques connus ne pouvaient expliquer à eux seuls de telles quantités. Certains astrophysiciens invoquent alors comme origine possible la matière noire, dont la distribution supposée colle avec l’apparente symétrie du nuage.
Plus de matière noire, mais des sources X binaires de faible masse
Seulement voilà, en cumulant toutes les observations obtenues ces 4 dernières années par SPI, les scientifiques ont affiné la cartographie du nuage. Et là, surprise ! L'antimatière se distribue en fait de façon très asymétrique. Il y en a deux fois plus d’un côté que de l’autre, ce qui met à mal l’hypothèse « matière noire ».

En revanche, cette répartition correspond à celle, mise en évidence par l’imageur Ibis d’Integral, d’un certain types astres, appelés sources X binaires de faible masse. Il s’agit de couples formés d’une petite étoile orbitant autour d’un objet compact, généralement une étoile à neutrons ou un trou noir.
La chute de la matière de l’étoile sur l’astre compact dégage une énorme quantité d’énergie, principalement sous la forme d’un très important rayonnement X. Il y a également production d’un plasma susceptible d’engendrer des positons.
Lorsque ceux-ci rencontrent ensuite des électrons, ils s’annihilent en émettant un rayonnement gamma très caractéristique, à 511 keV. « C’est ce rayonnement que détecte, avec une très grande précision, le spectromètre SPI », explique Yves André, ingénieur Cnes dont l’équipe a participé à la conception et au développement de l’instrument.

Quoi qu’il en soit, il n’y a plus besoin dans ce scénario d’invoquer la matière noire. Prochaine étape : affiner encore les cartes pour tester des modèles plus précis.