26 Novembre 2020

[Vendée Globe 2020] Le suivi des glaces pour éviter les pièges du grand sud 

Journal de bord #2 - Sophie Besnard

 Entre la voile et l’espace, les liens sont beaucoup plus étroits qu’on pourrait le penser. Tout au long du Vendée Globe, des femmes du spatial livrent leur journal de bord en lien avec la course légendaire. Dans cette deuxième page, Sophie Besnard, directrice des affaires internationales de CLS, explique comment le service de détection des glaces sécurise le parcours des bateaux.

Journal de bord #2 - Sophie Besnard 

Aujourd’hui 26 novembre, bientôt trois semaines de course ! La plupart des bateaux ont déjà basculé dans l’hémisphère Sud ou sont en passe de franchir l’équateur. De Toulouse, où l’on commence à ressentir les premiers froids, je pense aux skippers qui manœuvreront bientôt à pleine vitesse dans les eaux subantarctiques, au sud des trois caps mythiques, Bonne-Espérance, Leeuwin et Horn. J’espère qu’aucun ne croisera la route d’un iceberg. En tout cas, nous faisons tout pour.  

Le Vendée Globe, je l’ai suivi directement pendant plus de 10 ans chez CLS. Depuis quatre éditions, nous fournissons un service de suivi des glaces à la direction de course, sur lequel j’ai beaucoup travaillé depuis l’origine. Pour cela, nous combinons toutes les données satellitaires dont nous disposons. Il s’agit principalement d’images radar, complétées par les données altimétriques et optiques, qui nous permettent de détecter les plus gros icebergs. Ces énormes blocs issus de l’Antarctique remontent petit à petit et se fragmentent sous l’effet du vent et des vagues, jusqu’à former des growlers, des petits icebergs de quelques mètres, des OFNI (Objets Flottants Non Identifiés) que les skippers ne peuvent pas voir et qui sont extrêmement dangereux.  

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Vue aérienne des icebergs en Antarctique Crédits : redtea

Les informations satellite sont intégrées dans notre modèle de dérive d’objets à la mer, qui utilise les données météorologiques, les prévisions de vents et de courants pour anticiper ces mouvements. Toutes ces informations, une fois croisées, nous permettent de déterminer en étroite collaboration avec la direction de course la zone d’exclusion antarctique (ZEA), c’est-à-dire la limite des glaces, au-dessous de laquelle il ne faut pas se risquer. 

Un de nos défis est de placer la zone d’exclusion le plus au sud possible pour ne pas allonger démesurément le parcours au détriment de la performance sportive. Mais en tout état de cause, la sécurité de tous les skippers reste la priorité absolue. La limite, figée en septembre, a été communiquée aux équipes, qui ont pu ainsi calculer la distance théorique à parcourir, le nombre de jours à bord, et prévoir les provisions de nourriture en conséquence. Nous avons ensuite actualisé la zone d’exclusion 2 jours avant le départ.  

Maintenant que la course est lancée, nous sommes entrés en mode d’acquisition des images radar en temps réel, en fonction de la position et de la route suivie par le leader. Le satellite imageur Sentinel-1 est programmé avec quelques jours d’avance sur son passage théorique afin de pouvoir modifier la ligne si cela est nécessaire. Au fil de la course, des écarts importants vont se creuser entre les concurrents, jusqu’à plusieurs semaines. Mais bien sûr, l’exigence de sécurité est la même pour tous. Nous restons mobilisés jusqu’à ce que le dernier ait franchi le cap Horn. 

En tant que fan de voile, je suis de près professionnellement et personnellement le Vendée Globe. J’admire ces aventuriers et l’équipe de course. J’espère avoir la chance de partir un jour pour un tour du monde, ou tout du moins un bout, à bord d’un IMOCA.

Sophie Besnard

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Sophie Besnard Crédits : CLS


CLS ET LE VENDÉE GLOBE

CLS, filiale du CNES, partenaire historique du Vendée Globe, met au service de la course son expertise en traitement de données satellitaires radar, altimétriques (technologie dédie à la mesure de la hauteur de mer, technologie portée par le CNES utilisée par CLS pour pré-détecter les icebergs) et en modélisation de courants océaniques pour détecter la présence et prévoir la dérive des icebergs tout autour de l’Antarctique. Sur les 3 dernières éditions du Vendée Globe, plusieurs dizaines d’icebergs, pouvant menacer le parcours des skippers, ont été détectés par CLS. CLS a pour mission de détecter les zones les plus dangereuses. Elle définit en collaboration avec la direction de course la zone exclusive antarctique. L’entreprise met ses meilleures équipes au service de la course et de sa sécurité.