31 Juillet 2018

[Galileo] La révolution du positionnement centimétrique en marche

Avec sa 4e fréquence d’émission, Galileo ouvre la voie à la diffusion d'une nouvelle méthode de localisation instantanée par satellites au centimètre près. On vous explique tout (ou presque) sur cette technique made in CNES.
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Crédits : Thinkstock.

Vous possédez un smartphone de dernière génération ?

Si oui, votre position est alors déduite des signaux qu’il reçoit à la fois de satellites GPS et de satellites Galileo. Le tout avec une précision de l’ordre de 5 à 10 m. « Il est difficile de connaître exactement cette précision car elle dépend fortement des conditions atmosphériques et des corrections, que nous ne connaissons pas, appliquées par les fabricants de puce » indique Denis Laurichesse, ingénieur au sein du service “Missions et services de Navigation” du CNES à Toulouse. 

Une douzaine de sources d’erreurs affecte en effet la localisation précise d’un point par le système de positionnement par satellites dit GNSS (pour Global Navigation Satellite System). Ce sont, par exemple, des erreurs liées :

  • à la détermination de l’orbite des satellites,
  • à la synchronisation de leurs horloges,
  • à la propagation du signal dans l’atmosphère terrestre,
  • aux réflexions parasites qui dépendent de l’environnement de réception (présence d’immeubles dans les grandes villes),
  • aux caractéristiques de l'antenne du récepteur…

 

Pour enlever ces sources d'erreurs et atteindre une précision de l’ordre du centimètre, le CNES a développé, avec persévérance et perspicacité, une méthode de calcul totalement novatrice. 

Actuellement, la distance entre un satellite GNSS et un récepteur est calculée via le temps mis par le message pour arriver au récepteur. « Avec notre méthode, cette distance est calculée via le nombre de sinusoïdes portés par l'onde envoyée par le satellite et captée par le récepteur » explique Denis Laurichesse. Il suffit ensuite de multiplier ce nombre de ''vagues'' (plus de 100 millions !) par la longueur de l'onde électromagnétique de fréquence connue (environ 20 cm).

vers un changement de paradigme ?

Jusqu’au début de l’année 2018, cette méthode made in CNES avait un inconvénient majeur. Elle nécessitait que le récepteur reçoive, sans AUCUNE discontinuité, les signaux en provenance d’au moins 5 satellites durant une trentaine de minutes. Il ne fallait pas passer sous un pont ! Mais cette limitation vient de disparaître grâce à la mise à disposition gratuite par la Commission européenne de la 4e fréquence des satellites Galileo en mars 2018. Une expérimentation menée par le CNES en Australie, en collaboration avec un laboratoire canadien du NRCAN, vient de le montrer. Les résultats ont été publiés — en priorité  —  dans le journal GPS World, le 4 juillet 2018 (voir l'article). 

Par rapport au GPS qui ne diffuse ses signaux de navigation que sur 3 bandes de fréquences, Galileo nous gratifie d’une 4e bande.

Le traitement optimal des données de navigation issues de ces 4 bandes permet d’atteindre des performances ultimes. L’utilisateur pourra bientôt accéder en temps réel et de façon instantanée à une précision centimétrique grâce à Galileo » souligne Nadia Karouche, cheffe du service “Missions et services de navigation” du CNES.

Cette révolution méthodologique devrait concerner, dans un premier temps, des applications professionnelles au bénéfice de l’agriculture, la construction, les transports (voitures ou trains autonomes) car les récepteurs multi-fréquences coûtent plus chers que les mono-fréquences. Toutefois, rien ne semble empêcher leur avènement pour le grand public puisque les premiers téléphones dotés d’un récepteur bi-fréquence sont déjà sortis en Chine, en juillet 2018. De plus, des fabricants de puces ont ouvert les mesures brutes des capteurs GNSS, ce qui a déjà permis au CNES de développer une application de position précis pour smartphone sous Android appelée PPP WizLite. Les satellites chinois Beidou dotés de 5 fréquences de signaux devraient également contribuer à l’émergence et l'expansion de ces techniques dites de “positionnement précis en temps réel” (ou PPP pour Precise Point Positioning).

On vous avait prévenu : une révolution dans le monde GNSS est en marche...  Et les équipes du CNES sont sur le pont pour apporter leur contribution à cette dynamique et révéler tout le potentiel de Galileo.

La méthode de calcul made in CNES fait l’objet d’un accord avec la société Géoflex pour sa commercialisation depuis juin 2016.